Chronique des médias

L’actu des médias, les médias dans l’actu : tel est le propos de cette chronique qui se propose de décrypter ce qui change les médias à l’ère numérique - et donc la façon dont on est informé. Les évolutions technologiques, la crise des modèles classiques, les nouveaux vecteurs d'information... Tels sont quelques-uns des éléments qui seront explorés sur la planète média. Tout en couvrant les grands événements «médias» qui touchent la France, une attention particulière sera accordée à l'actualité internationale des médias, notamment intéressant les pays du Sud. La chronique pourra revenir aussi avec un regard critique sur la façon dont les médias couvrent certains évènements et sur la façon dont les médias sont eux-mêmes transformés par une actualité qui leur est propre. En partenariat avec le magazine «Stratégies». *** Diffusions le samedi (Monde) à 08h20, 19h26. (Afrique) à 08h23.  

  • 2 minutes 56 seconds
    De grands journaux abandonnent le réseau social X d'Elon Musk

    Le réseau social d'Elon Musk, X, anciennement Twitter, est ostensiblement abandonné par de grands journaux. Après le Guardian, le journal britannique, c'est au tour du quotidien de Barcelone, La Vanguardia, d'annoncer qu'il ne publiera plus de contenus sur X.

    Le Guardian avait été très marqué par le rôle du réseau d'Elon Musk dans les émeutes racistes de cet été en Angleterre. La Vanguardia, elle, retient l'influence néfaste de bots indiens qui ont poussé sur X de la désinformation au moment des inondations de la région de Valence. Le Guardian parle de « plateforme médiatique toxique », La Vanguardia de « réseau de désinformation ».

     

    Les deux journaux estiment que les inconvénients à publier sur X sont aujourd'hui supérieurs aux avantages, même s'ils n'empêchent pas de partager leurs articles. Le quotidien britannique dénonce un « contenu souvent dérangeant promu ou trouvé sur la plateforme, incluant des théories du complot de l'extrême droite et du racisme ».

    L'appui apporté à Elon Musk dans l'élection de Donald Trump en cause

    Pendant la campagne, les utilisateurs de X avaient deux fois plus de chances d'être exposés à des contenus pro-Trump, qu'à des sources pro-Harris. Elon Musk a milité aux meetings de Trump, il a personnellement investi 130 millions de dollars dans sa campagne, notamment avec sa loterie et ses chèques d'un million de dollars dans les États clés. Il en a été récompensé en étant nommé à la tête d'un ministère de l'efficacité gouvernementale.

    Sur son réseau social, Elon Musk a fait de la libre expression une vertu cardinale, quitte à relayer des infox et des intox, déclenchées par son algorithme. « Le média, c'est vous », a dit Musk à ses utilisateurs. En réalité, le média, c'est plutôt lui, Elon Musk.

    Reporters sans frontières a annoncé jeudi qu'elle poursuivait sa société, car X a diffusé, sans modération, une vidéo attribuée faussement à la BBC et reprenant le logo de RSF pour attester d'un prétendu penchant nazi des Ukrainiens.

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    Des conséquences au niveau européen

    Une petite phrase du futur vice-président J.D. Vance, pendant la campagne, n'a pas manqué d'attirer l'attention à Bruxelles. Le recours à « la puissance américaine, a-t-il dit, est assorti de certaines conditions. L'une d'elles est le respect de la liberté d'expression ». Or, X fait en ce moment l'objet d'une enquête de la Commission européenne au nom du règlement sur les services numériques. Imagine-t-on la nouvelle Commission attaquer de front le principal soutien de Trump ? Elle espère surtout du futur président qu'il ne se désengage pas totalement de l'Ukraine et qu'il n'entre pas en guerre commerciale avec l'Union européenne.

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    15 November 2024, 11:01 pm
  • 2 minutes 39 seconds
    Canal+ fête ses 40 ans et confirme ses ambitions de conquête à l'international

    La chaîne de télévision Canal+ a fêté ses 40 ans le 4 novembre. Et aujourd'hui, le groupe affiche de grandes ambitions internationales.

    Si on parle encore parfois de Canal+ comme d'une chaîne cryptée, c'est en référence à ses débuts, il y a 40 ans, lorsqu'elle a été la première à se lancer sur un modèle par abonnement. Elle était alors perceptible, avec son floutage et ses grésillements, sur le quatrième canal d'une télévision qui ne comptait à l'époque que trois chaînes.

    Son fondateur est André Rousselet qui, en tant que président de Havas, est un proche du président français François Mitterrand. C'est lui qui va faire le succès de Canal+. Il démissionne et est remplacé par Pierre Lescure en 1994, lorsque Canal+ tombe sous la dépendance de la Compagnie générale des eaux de Jean-Marie Messier. Puis, le groupe s'engage dans l'aventure américaine de Vivendi, qui rachète Universal et essuie son premier échec en Italie. Canal+ se redresse et développe ses séries originales sous la présidence de Bertrand Méheut. Ce n'est qu'en 2014-2015 que Vincent Bolloré prend le contrôle du groupe.

    Nouvelle stratégie sous Bolloré

    Et là, beaucoup de choses changent pour Canal+. D'abord parce que Vincent Bolloré apporte avec lui sa chaîne de la TNT qui va devenir C8. Sous sa houlette, la chaîne d'information en continu Itélé se transforme en CNews. Deux chaînes que le régulateur a plusieurs fois mis à l'amende et qui sont accusées de pencher à l'extrême droite.

    Vincent Bolloré fait subir une cure d'austérité à la chaîne Canal+ en supprimant la plupart de ses programmes gratuits comme le Grand Journal ou les Guignols de l'info. C'en est fini du ton libre et décalé de Canal. La chaîne conserve son engagement dans le cinéma mais arrête d'être le diffuseur de la Ligue 1. Le groupe va perdre sa fréquence TNT pour C8. Il se voit désormais d'abord comme un distributeur de programmes à travers MyCanal, qui diffuse les principales plateformes de streaming.

    Entendre son emprise à l'international

    Et c'est aussi un nouvel axe pour Canal+ à l'international, notamment en Afrique. Le groupe était déjà présent en Afrique, mais il se développe en Europe centrale et en Asie. Les deux tiers de ses 26 millions d'abonnés se situent désormais hors de France, où il reste déficitaire. C'est au printemps que le groupe lance une offre publique d'achat sur son rival sud-africain Multichoice, pour s'implanter en Afrique anglophone et lusophone. Il lui reste encore à convaincre les autorités anti-trust à Johannesburg, notamment en montrant qu'il prend des engagements pour le maintien de l'emploi, alors que la loi interdit à une société étrangère d'avoir plus de 20% des droits de vote.

    S'il réussit, le groupe arrivera à 50 millions d'abonnés. Il sera coté à Johannesburg, après avoir été coté à Londres à compter de décembre prochain. Un signe de sa volonté d'attirer les investisseurs et de poursuivre ses acquisitions.

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    8 November 2024, 11:05 pm
  • 2 minutes 58 seconds
    Les médias à la veille de leur nuit américaine

    Comment les médias se mobilisent pour couvrir l'élection américaine ? Avec un enjeu pour cette élection, montrer qu'ils ne sont pas que des machines à promouvoir les opérations de com. 

    On le voit aux spots de pub incessants à l'approche du 5 novembre, notamment dans les États pivot, les fameux « swing states ». Pour une soirée sur la chaîne NBC, vous avez six à huit spots par candidat. Trump s'y présente comme le sauveur de l'Amérique quand Harris met en scène un ouvrier qui vote pour son avenir. Selon le cabinet eMarketer, la communication politique va totaliser 12,32 milliards de dollars de dépenses contre 9,5 en 2020. Une com qui se retrouve aussi sur les écrans à travers la stratégie de Donald Trump consistant à retourner en sa faveur des éléments de discours. Exemple : Kamala Harris dit avoir fait un job d'été chez Mc Donald's. « Elle ment » assure Trump qui apparaît en serveur dans un restaurant McDo. Mercredi, c'est au volant d'un camion poubelle qu'il est apparu pour rebondir sur la gaffe de Joe Biden traitant les supporteurs de Trump d'« ordures ». Une façon de prendre au pied de la lettre le mot du président qui répliquait lui-même à l'insulte d'un humoriste pro-Trump contre des Portoricains. Le candidat a un côté clown, mais il se met ainsi au centre de l'agenda médiatique et oblige la campagne à se définir autour de ses mises en scène. Pour les médias comme les réseaux sociaux, il est alors difficile de ne pas se mettre à la remorque du camion-poubelle. 

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    Et en France comme aux États-Unis, les médias se préparent...

    Un studio délocalisé à Washington pour TF1-LCI avec 40 personnes sur place. Une centaine mobilisée pour France Télévisions avec un 20 heures de France 2 en direct de New York. 11 équipes de reporters et une quinzaine de figures de l'antenne pour BFMTV. Et pour France 24 qui sera en édition spéciale commune avec RFI dès 19 heures, cette nuit américaine sera francophone avec des partenaires belges et suisses de la RTBF de la RTS. Elle sera aussi diffusée sur les chaînes parlementaires Public Sénat et LCP. L'enjeu est de tenir l'antenne en évitant les pièges de la désinformation sur des tricheries éventuelles alors que les médias américains auront la responsabilité de dire par qui a été remporté un État clé. Pour cela, ABC, CBS, NBC et CNN s'appuient sur un même institut, Edison Reseach, mais aussi sur leurs « decision desks », des équipes de statisticiens. Enfin, il faut compter avec le rôle des grands quotidiens qui avaient appelé, dans leur très grande majorité, à voter Biden en 2020. Cette fois, ni le Washington Post de Jeff Bezos ni le Los Angeles Times de Patrick Soon-Shiong ne se prononceront, en raison de l'opposition de leur propriétaire. Un peu comme si là aussi se jouait une bataille entre deux Amériques : celle des milliardaires contre celle des citoyens.

    1 November 2024, 11:15 pm
  • 2 minutes 49 seconds
    Au Mexique, les journalistes face à la violence des cartels

    Le 17 octobre, un journal a été la cible de tirs au Mexique, une attaque qui rappelle que le pays est l'un des plus dangereux pour les journalistes.

    Deux véhicules s'arrêtent devant un journal de Culiacan, dans l'État de Sinaloa, bien connu pour son cartel et la violence de ses gangs, le 17 octobre dernier. Et devant ce journal, El Debate, un homme tire une rafale contre les vitres de la rédaction. Heureusement, il n'y a eu aucune victime. Mais cette attaque montre bien que le Mexique de la nouvelle présidente Claudia Sheinbaum, qui a pris ses fonctions le 1er octobre, n'en a pas fini avec les menaces contre ses journalistes.

    En 25 ans, 160 professionnels des médias ont été tués au Mexique, selon Frédéric Saliba, l'ancien correspondant du Monde qui vient de publier Cartels aux éditions du Rocher. Cela en fait un des pays les plus dangereux au monde pour les journalistes, même si, il faut le rappeler, le niveau de violence est très élevé pour l'ensemble de la population avec plus de 30 000 morts violentes par an, 450 000 en dix-huit ans. Les reporters sont précisément des cibles à cause de ce qu'ils révèlent de cette violence du crime organisé. 

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    L'année 2024 ne montre aucune amélioration

    L'an dernier, Reporters sans frontières (RSF) a recensé quatre journalistes mexicains tués. Et depuis le début de cette année, il y en a eu déjà autant, dont Luis Martin Sanchez Iniguez, du quotidien La Jornada, ou Alejandro Alfredo Martinez Noguez, qui bénéficiait pourtant d'une protection de l'État avec des gardes du corps.

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    Reporters sans frontières parle de « spirale incontrôlée contre les professionnels des médias » et relève que le précédent mandat d'Andrés Manuel Lopez Obrador n'a apporté aucune réforme pour lutter contre l'impunité sur ces crimes.

    Mario Gomez Sanchez, par exemple, a été assassiné en 2018 dans l'État du Chiapas après avoir dénoncé la corruption et le crime organisé. Trois hommes de mains sont en prison, mais les commanditaires, probablement liés au milieu politique, ne sont toujours pas inquiétés. La collusion entre les autorités et le crime organisé est courante au Mexique.

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    La présidente Claudia Sheinbaum s'est engagée à mieux lutter contre ces crimes

    La nouvelle présidente a promis d'encadrer le système judiciaire pour assurer de véritables enquêtes sur les crimes commis contre les journalistes, en particulier au niveau local, en lien avec les parquets.

    Dans le passé, il y a aussi eu des cas de manipulation de la justice et même des médias audiovisuels Televisa et TV Azteca. L'affaire Florence Cassez, cette Française arrêtée après une mise en scène de l'ancien chef de la lutte anti-drogue, Genaro Garcia Luna, en est une illustration. Il est aujourd'hui en prison aux États-Unis, accusé de complicité avec le cartel du Sinaloa. Il aurait aussi tenté de faire assassiner la journaliste Anabel Hernandez, plume d'or de l'Association mondiale des journaux, qui a enquêté sur lui.

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    25 October 2024, 10:13 pm
  • 2 minutes 48 seconds
    Présidentielle aux États-Unis: la campagne électorale s'éloigne des médias traditionnels

    Le 5 novembre 2024, les citoyens états-uniens voteront pour leur nouveau président. L’une des particularités de cette campagne électorale, c’est que c’est sans doute celle qui est la plus éloignée des grands médias traditionnels.

    En 2024, la campagne électorale se tient éloignée des médias traditionnels et pour s'en convaincre, il suffit de regarder le nombre de débats politiques à la télévision entre Kamala Harris et Donald Trump : il n’y en a eu qu’un, le 10 septembre, après le débat Biden-Trump désastreux pour l’actuel président. Depuis, on le sait, Donald Trump refuse tout débat télévisé. Son face-à-face avec la vice-présidente n’a pas tourné à son avantage tant les journalistes de la chaîne ABC l’ont renvoyé à ses mensonges et à ses incohérences.

    Kamala Harris a eu recours au réseau social X d’Elon Musk, le farouche soutien de Donald Trump, pour dire qu’elle avait accepté un deuxième débat et une interview sur 60 minutes, de CBS, contrairement à son adversaire, et qu’il fallait donc se demander ce qu’il essayait de cacher. Elle-même s’est rendue sur l’antenne de la très conservatrice Fox News le 16 octobre et elle a joué le jeu d’un vétéran des ondes, Howard Stern, pour dévoiler ses goûts musicaux.

    Les candidats fuient les médias traditionnels... pour échapper à la contradiction ?

    On peut le penser s’agissant de Donald Trump, qui se retrouve à son tour attaqué sur ses capacités cognitives ou son âge. Il n’a sans doute pas envie non plus de répondre au récent livre de Bob Woodward qui affirme qu’il a continué d’avoir une relation avec Vladimir Poutine depuis l’invasion de l’Ukraine. Sans compter les multiples procès dans lesquels il est impliqué. Il préfère donc s’exprimer en public dans ses meetings, sur Fox News ou auprès d’influenceurs comme Andrew Schulz.  

    C'est un peu comme si la campagne se jouait ailleurs : chez les podcasteurs, les influenceurs, où on peut dérouler son discours sans être contredit. Pour Kamala Harris, qui n’a pas plus accordé d’entretien à la presse écrite, c’est différent. Elle ne veut sans doute pas se laisser enfermer dans une image de candidate des journaux de la côte Est. Pour elle, ce n’est plus la bataille d’arguments qui compte, mais la mise en avant de sa personnalité sur des plates-formes comme Spotify avec la podcasteuse Alexandra Cooper.

    La question du fact-cheking est posée

    Lors du débat des colistiers, le républicain J.D. Vance a pu affirmer : « les règles étaient que vous ne deviez pas faire de fact-checking » à propos des migrants haïtiens illégaux. Vérité médiatique contre-vérité alternative, le camp Trump rejoue le même match.

    Au fond, il y a un seul domaine où les médias ne sont pas contestés. C’est celui d’un matraquage publicitaire record. Le camp démocrate aurait collecté près d’un milliard de dollars, et il aurait déjà dépensé deux fois et demie plus que son rival dans des spots télé de trente et même de soixante secondes. 

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    18 October 2024, 10:08 pm
  • 3 minutes 2 seconds
    Un an de couverture médiatique au Proche-Orient

    Il est de plus en plus difficile de couvrir les guerres d'Israël contre le Hamas à Gaza puis contre le Hezbollah au Liban, alors même que se tient en Normandie le prix Bayeux des correspondants de guerre.

    À Bayeux, la soirée de ce vendredi était justement consacrée au grand reportage au Proche-Orient. La veille, a été dévoilée une stèle portant les noms de 56 journalistes tués dans l'exercice de leur profession durant l'année écoulée. 56 reporters dont une trentaine de Palestiniens pour lesquels un olivier a été planté. En réalité, selon Reporters sans frontières, ce ne sont pas 30, mais 130 journalistes qui ont été tués depuis le 7 octobre à Gaza et, précise RSF, au moins 32 de ces reporters ont été ciblés et tués en plein travail.

    La bande de Gaza difficile d'accès

    Les bureaux de journalistes locaux de l'AFP ont été la cible de chars israéliens à Gaza ville, en novembre 2023. On sait aussi qu'un reporter de Reuters a été tué au Liban Sud le 13 octobre, après deux tirs de chars blessant également d'autres journalistes. Quatre plaintes ont été déposées par RSF contre Israël devant la Cour pénale internationale.

    Et ce qui caractérise le conflit à Gaza, c'est le blackout médiatique imposé par Israël. Selon la presse allemande, c'est sans précédent dans l'histoire récente. L'armée israélienne empêche les journalistes occidentaux de se rendre à Gaza et les rares qui sont autorisés à le faire sont extrêmement encadrés. Le motif officiel est d'éviter qu'ils soient tués, mais c'est surtout une véritable stratégie. Car cette interdiction empêche toute intermédiation occidentale avec les traumatismes, les souffrances inouïes que vit la population gazaouie.

    Alors, bien sûr, les rédactions cherchent à contourner ce blocus en sollicitant les sources dont elles disposent sur place ou en vérifiant ce qui arrive sur les réseaux sociaux. Et c'est pourquoi les vidéastes et journalistes à Gaza sont visés, qu'ils soient en train de prendre des images ou, comme tout le monde, de rechercher un toit ou de la nourriture.

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    Des journalistes présents au Liban

    Mais pour la guerre que mène Israël au Liban, il est Impossible d'empêcher les envoyés spéciaux de constater les bombardements à Beyrouth. Les journalistes peuvent mesurer directement l'ampleur des destructions ou le dénuement du million de déplacés. C'est important, car on a vu à travers un sondage récent (Destin Commun) que les deux tiers des Français déplorent l'invisibilisation des morts palestiniens.

    Or, invisibiliser, cela permet à l’armée israélienne et à ses porte-paroles de continuer de dérouler sa propagande à travers des discours parlant de « raids terrestres localisés » alors même qu'elle se prépare à envoyer 15 000 hommes au sud du Liban. Une vérité de terrain qui incitera peut-être certains médias audiovisuels à écouter davantage ses reporters que ses éditorialistes.

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    11 October 2024, 10:05 pm
  • 2 minutes 51 seconds
    La Tunisie dans l’automne de ses libertés

    Les atteintes à la liberté d’expression se multiplient en Tunisie à l’occasion des élections présidentielles de ce dimanche, dont le président sortant Kaïs Saïed est le grand favori.

    Pour qui se souvient des espoirs que la révolution de Jasmin avait engendré, en 2011, avec ses agoras citoyennes sur l’avenue Bourguiba de Tunis et son printemps des blogs, la Tunisie de Kaïs Saïed ressemble à un automne des libertés publiques, et en particulier pour les journalistes et les médias.

    En mai dernier, une journaliste de France 24 et son caméraman avaient filmé en direct l’arrestation brutale de l’avocate et chroniqueuse Sonia Dahmani qui a depuis été condamnée en appel à huit mois de prison ferme. En vertu du décret-loi 54 de 2022 sur la « diffusion de fausses nouvelles », elle s’était rendue coupable – selon la justice tunisienne – de propos jugés critiques à l’égard du président. Comment ? Eh bien en ironisant sur la théorie du grand remplacement à la tunisienne alors que Kaïs Saïed avait fustigé des « hordes de migrants subsahariens » et un « complot » pour changer la démographie de la Tunisie. « Mais de quel pays extraordinaire parle-t-on », avait demandé l’avocate sur un plateau de télévision. Quelques jours après, elle était arrêtée.

    Une dégringolade de 48 places au classement mondial de RSF

    Reporters sans frontières a alors parlé d’« escalade répressive » à l’encontre des journalistes. Car en effet, les images où l’on voit l’équipe de France 24 bousculée par les services de sécurité ne sont rien à côté de la réalité que vivent les médias tunisiens. Alors qu’une vingtaine de journalistes et une quarantaine d’avocats et de figures politiques ont été poursuivis sur la base du décret 54, selon le syndicat des journalistes tunisiens, deux chroniqueurs de la radio IFM et de la chaîne Carthage+, Bohren Bsaïes et Mourad Zeguidi, ont été condamnés à un an de prison.

    Le motif est toujours le même : la diffusion de fausses nouvelles. Mais pour avoir refusé de livrer leurs sources sur une opération antiterroriste, comme l’ont fait Noureddine Boutar et Khalifa Guesmi, de Mosaïque FM, la peine peut aller jusqu’à cinq ans de prison. Sans compter les intimidations et les coups pendant les manifestations. Comme dit l’humoriste exilé Lofti Abdelli à France 24, « On est le seul peuple arabe qui peut dire : "on est en dictature" ».

    Dérive autoritaire

    Et de son côté, le président Saïed ignore la presse. C’est bien simple : il ne fait pas campagne, il se refuse absolument à répondre aux journalistes et il ne participe à aucun débat télévisé, à la différence de sa première candidature lors de l’élection de 2019. Dans le plus pur style populiste, le président rejette toute forme d’intermédiation avec des journalistes et entend parler directement au peuple sur les réseaux sociaux. C’est du reste sur ces réseaux que viennent, le plus souvent, la désinformation et les campagnes contre la presse.

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    4 October 2024, 10:10 pm
  • 2 minutes 57 seconds
    Au Sahel, la crainte d'un «trou noir de l'information»

    En Afrique de l'Ouest, la crainte d'un « trou noir de l'information » est ravivée cette semaine par un appel de plus de 500 radios locales du Sahel.

    L'expression « trou noir de l'information » est de Reporters sans frontières (RSF), et Sadibou Marong, le directeur du bureau Afrique de l'organisation, l'a réitérée mardi, après avoir recueilli la signature des responsables de 547 radios communautaires. Avec une vingtaine de directeurs de ces radios présents à Bamako, RSF lance un appel aux autorités des pays du Sahel où sévissent des bandes armées ainsi que des groupes jihadistes.

    Au Mali, au Niger, au Burkina Faso et dans certaines zones du Tchad, ils demandent d'abord qu'on ouvre des enquêtes sur deux journalistes de ces radios tués ces derniers mois, Abdoul Aziz Djibrilla et Idriss Yaya. Ils demandent aussi qu'on agisse pour obtenir la libération de quatre d'entre eux qui ont été enlevés, notamment deux reporters de Radio Coton d'Ansongo, au Mali. Les radios communautaires, qui diffusent en langues locales, sont souvent l'un des rares vecteurs d'information. Et les protéger, reconstruire leurs locaux quand ils sont détruits ou reconnaître leur rôle dans les législations devraient être, selon RSF, une priorité.

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    Un journaliste de France 24 poursuivi au Niger

    Du côté des médias internationaux, les poursuites engagées contre Wassim Nasr, un journaliste de France 24, témoignent aussi d'une volonté d'empêcher toute information indépendante. Dans un communiqué, le procureur de la République du Niger, qui a ordonné l'ouverture d'une enquête contre ce journaliste, tout en saluant « le professionnalisme et la bravoure des Forces de défense de la Confédération des États du Sahel », reproche à Wassim Nasr des « commentaires tendancieux au lendemain de chaque attaque terroriste » qui sont assimilés à « des actes de publicité et de soutien flagrant aux terroristes ».

    Bien sûr, France 24 dénonce ces accusations concertées avec le Mali et le Burkina Faso et exprime son soutien à son journaliste, qui travaille dans le respect des règles professionnelles, c'est-à-dire en recoupant ses sources au lieu de lire les communiqués du pouvoir.

    Car après les arrestations arbitraires et l'éviction de médias internationaux comme RFI, France 24 ou TV5, le but est bien d'imposer l'autocensure. Le « trou noir de l'information » n'empêche pas les Africains ayant accès au numérique de s'informer, ainsi qu'en attestent les 4,4 millions d'abonnés à la chaîne WhatsApp de France 24. Mais il empêche les gens situés dans les zones les plus reculées, là même où diffusent les radios communautaires, d'être informés et de garder un lien avec l'extérieur. C'est précisément ce que souhaitent les jihadistes qui ne veulent pas voir questionnés leur idéologie et leurs actes.

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    27 September 2024, 10:03 pm
  • 2 minutes 45 seconds
    Netflix: toutes les annonces des séries et films à venir sur la plateforme américaine

    À l'occasion de ses 10 ans de présence dans l'hexagone, tour d'horizon des séries à venir sur la plateforme américaine.

    À son lancement en France en septembre 2014, Netflix était déjà précédée de sa réputation de plateforme mondiale. Et pourtant, cela n'avait pas empêché ses promoteurs d'offrir un abonnement de trois mois aux journalistes pour les inciter à plonger dans son univers et découvrir des séries comme Orange is the New Black, House of cards puis des créations européennes comme la Casa de Papel ou Marseille, sa première série française dès 2016.

    Aujourd'hui, en France, Netflix dénombre une vingtaine de contenus originaux par an, dont Lupin avec Omar Sye, Tapie avec Laurent Laffite ou, dernièrement, le fameux Sous la Seine, ce film de requin, sorti au moment des Jeux olympiques, déjà vu plus de 100 millions de fois.

    La plateforme est obligée d'investir 20 % de son chiffre d'affaires en France dans la création audiovisuelle, soit 250 millions d'euros, c'est-à-dire dans les séries, mais aussi les films et les documentaires. Elle compte 10 millions d'abonnés français, mais dispose, depuis un an, d'une petite particularité : sa formule de base, à près de six euros, contient de la publicité. Alors qu'il fallait débourser huit euros pour l'abonnement standard sans pub il y a dix ans, il faut compter 13,5 euros désormais.

    Netflix France a présenté au Festival de fiction de La Rochelle, la semaine dernière, ses prochaines créations qui n'échappent pas à la grande tendance du moment, à savoir « le thriller d'époque ». Exemple avec une saga de l’été Qui sème le vent, sur un meurtre dans une exploitation florale avec Isabelle Adjani et Ava Baya.

    Mais on peut citer aussi Les lionnes, l’histoire de quatre Marseillaises vivant dans la misère qui décident de faire un braquage, la série GIGN avec Tomer Sisley, ou encore Bandi d’Eric Rochant sur une famille martiniquaise qui bascule dans le monde des gangs et de la drogue. Au fond, les séries veulent refléter les angoisses de la France d’aujourd’hui, ce qu’on voit aussi dans Cimetière indien, de Canal+, sur des assassinats commis à trente ans d’intervalle au nord de Marseille, dans une France péri-urbaine sur fond de racisme et d’islamisme.

    Même Fortune de France, sur France 2, adaptation d’un livre de Robert Merle sur les guerres de religions au XVIème siècle, résonne avec une certaine actualité en raison de l’intolérance qu’elle met en scène. L’autre grande veine de la fiction française est sociale avec notamment, pour France 2, Signalements, sur l’enfance maltraitée, ou À l’épreuve qui suit le destin d’une femme seule contrainte de devenir éboueuse pour élever son enfant.

    20 September 2024, 10:00 pm
  • 2 minutes 40 seconds
    Des États généraux de l’information inspirants et critiqués, loin des promesses initiales

    Réunis à la demande du président français Emmanuel Macron, les États généraux de l’information viennent de rendre leurs conclusions, jeudi 12 septembre 2024, après onze mois de travaux. 

    C'est par un rapport de 350 pages que se sont soldés ces États généraux présidés par Bruno Patino, le patron d'Arte, qui les a repris après la démission de Bruno Lasserre, et plus encore après la mort brutale de Christophe Deloire, l'ancien dirigeant de RSF.

    Pour Bruno Patino, le plus important est sans doute que ce rapport, issu de 174 auditions et d'assemblées citoyennes, permette de défendre des vérités factuelles, donc le journalisme, face à ces contre-vérités qui minent le débat public. On l'a encore vu cette semaine lorsque Donald Trump a affirmé que les migrants mangeaient des chiens et des chats dans l'Ohio ou qu'ils affluaient par millions des prisons et des asiles d'aliénés. Lorsque le journaliste a rétabli les faits, il a été accusé par le candidat républicain d'être de parti pris.

    Que préconise le rapport ?

    Il s'agit d'abord de lutter contre la désinformation en favorisant une information de qualité sur les réseaux par un label de fiabilité, auquel souscriraient les médias, et qui pourrait être privilégié dans les algorithmes, tant auprès du public que des annonceurs. C'est tous le sens de la Journalism Trust Initiative, promue par RSF, qui se félicite également que le rapport reprenne ses mesures sur la protection du secret des sources et la législation contre les procédures bâillons qui visent à faire taire les journalistes. Le rapport suggère aussi qu'une partie de la taxe sur les services numériques, la fameuse taxe GAFA, soit affectée à l'information.

    Un rapport critiqué

    Carine Fouteau de Mediapart lui reproche d'oublier « les vrais ennemis du droit de savoir » que sont les acteurs politiques et économiques. Le rapport refuse de recommander un droit d'agrément des rédactions à la nomination de leur directeur, comme cela existe au Monde ou aux Échos, alors que c'est ce que réclamaient les journalistes en grève du JDD après le rachat de leur titre par Bolloré et l'imposition d'un directeur venu de Valeurs actuelles.

    À la place, le rapport suggère que soient mis en place des comités d'éthique paritaires où pourront être discutés les choix de l'actionnaire, ce qui ne risque pas de le dissuader beaucoup, même si est retenue l'idée de faire des présidents de sociétés de journalistes des salariés protégés. Mais ce qui est recherché, c'est un équilibre entre le droit à l'information et le droit d'entreprendre. Il revient maintenant au gouvernement d'arbitrer ce « rapport Macron-compatible » qui n'en contient pas moins des pistes d'amélioration.

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    13 September 2024, 10:43 pm
  • 2 minutes 41 seconds
    Le double visage de Telegram, l'application controversée de Pavel Durov

    L’application cryptée dont le fondateur, Pavel Durov, a été mis en examen en France, est à la fois un canal de diffusion pour des médias et un outil de trafics criminels. Décryptage.

    C’est toute l’ambivalence de cette messagerie d’origine russe, qui est à la fois plébiscitée par l’opposition anti-Vladimir Poutine, car elle permet de diffuser de l’information non officielle, et qui est en même temps exploitée par des groupes de trafiquants ou de criminels, des déviants sexuels voire des réseaux terroristes. Dans l’univers des médias, Telegram est aussi du côté des pirates : elle diffuse des images sans payer de droit d’auteur et retransmet par exemple en France les matchs de la Ligue 1, profitant du prix élevé des abonnements.

    C’est d’ailleurs bien plus qu’une messagerie, plutôt une sorte d’internet crypté avec ses chaînes vidéo, ses espaces d’échange de fichiers, ses jeux vidéo, ses sites de paris et sa cryptomonnaie. Telegram s’est engagé à ne jamais révéler l’identité de ses utilisateurs ou de ses abonnés, et c’est pour cette raison que son patron est appréhendé par la justice, au vu des infractions pénales constatées.

    Un média non censuré

    Pavel Durov s’est exprimé jeudi 5 septembre sur Telegram pour dire qu’il supprimait « des millions de messages et de chaînes nuisibles chaque jour ». On peut en douter, mais c’est peut-être vrai si Telegram a une super IA qui permet de prohiber certains contenus. Une chose est sûre, c’est qu’elle n’a pas les équipes de modérateurs des grandes plateformes. Pour une raison simple : son modèle économique repose sur sa réputation d’espace libertarien non censuré, sans modération et l’absence de données personnelles.

    On peut d’ailleurs noter que Telegram vit non seulement de ses abonnés, mais aussi de la publicité. Avec un détail : il n’y a aucun ciblage sur les données personnelles, les publicités ne sont adressées que sur la base des thématiques ou des univers visités.

    Une application populaire en Russie

    Telegram est donc un outil précieux dans les régimes autoritaires. On le voit en Russie où Telegram est la première source d’information non censurée. Alexeï Venediktov, le patron de l’emblématique radio Echo de Moscou, a sa chaîne Telegram, avec 200 000 abonnés. Or, il est bien clair que c’est parce qu’il n’est pas sous le contrôle du Kremlin que ce média qui a critiqué l’invasion de l’Ukraine, qui est sur la liste des agents de l’étranger, utilise l’application. Du reste, l’Ukraine et Volodomyr Zelensky l’utilisent aussi. Et on a vu en Iran que c’est entre autres par Telegram que les militants d’opposition s’échangent des informations. « Une grammaire de la liberté contre l’État qui se heurte à notre grammaire civique » en Europe, comme dit Françoise Daucé dans Le Monde.

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