Reportage International

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  • 3 minutes 50 seconds
    Géorgie: à Gori, la difficile mobilisation contre la loi sur les influences étrangères

    En Géorgie, la mobilisation se poursuit contre la loi sur les influences étrangères, qui impose aux ONG et aux médias de se déclarer aux autorités si elles reçoivent plus de 20 % de leur budget de l’étranger. Cette législation, adoptée définitivement le mardi 14, est dénoncée quotidiennement par les manifestants qui se mobilisent massivement à Tbilissi. À l’extérieur de la capitale géorgienne, cependant, la mobilisation est plus difficile en raison, notamment, des pressions exercées sur les habitants. Reportage à Gori, petite ville de 50 000 habitants située à 80 km de Tbilissi, non loin de la ligne de démarcation avec l’Ossétie du Sud, l'un des deux territoires géorgiens occupés par la Russie depuis la guerre de 2008.

    De notre envoyé spécial à Gori,

    « Gori a été bombardée par les Russes en 2008 et ensuite, elle a été réhabilitée avec l’aide de l’Europe et des États-Unis. On ne doit jamais oublier ça ! »  C’est dans un petit square de Gori que nous rencontrons Teona Pahnkvelashvili, une militante de l’opposition mobilisée dès le premier jour contre la loi sur les influences étrangères. « Cette loi, c'est un copié-collé de la loi russe sur les agents de l’étranger et on a vu les conséquences ! C’est pour ça que je suis contre. »

    Sur son téléphone portable, Teona nous montre les images des trois manifestations organisées à Gori depuis le mois d’avril. Un motif de fierté, dans une ville où il est très difficile de mobiliser : « Les étudiants ont peur d’être suspendus, dans les entreprises, les gens ont peur de perdre leur emploi, car les patrons ici sont pro-russes… et du coup les gens n’osent pas manifester. »

    Teona, elle, n’a pas peur, pourtant depuis le début du mouvement. Elle a fait l’objet de menaces et d’insultes. « Ils m’ont appelé en pleine nuit, ils m’ont dit : "N’organise pas la manifestation sinon on va te faire très mal ! à toi et à ta famille". »

    À Gori, tout le monde ne voit pas d’un bon œil ces étudiants qui manifestent à Tbilissi, contre la loi sur les influences étrangères. Gouliko et Zviad, l’une retraitée, l’autre un professeur de karaté de 57 ans, approuvent pleinement cette législation : « Il fallait le faire même avant parce qu’on doit savoir d’où vient le financement et pourquoi ça vient. Les manifestations que vous voyez maintenant à Tbilissi qu’est-ce que vous en pensez, c’est financé par qui ? », se demande Gouliko. Et pour Ziad, ce professeur de karaté de 57 ans justifie sa position : « Ces ONG, si elles font de bonnes choses, pourquoi, se cachent-elles ?  Mais si elles font de mauvaises choses, si elles essaient de déstabiliser le gouvernement, bien sûr qu’il faut le dire ! ». 

    Liberté d'expression en danger 

    Ce que Gouliko et Zviad ne savent pas, c’est qu’avec cette loi l’un des centres culturels les plus actifs de Gori sera peut-être obligé de fermer. Fini les expositions financées pour une bonne partie, par les fonds européens, un crève-cœur pour Oto Guritshvili, membre du collectif Art House : « On ne sait pas comment ça va se passer avec la loi alors pour l’instant, on a gelé toutes nos demandes de subventions. L’Europe ou la Russie, on est de nouveau confrontés à ce choix : d’un côté l’État de droit, de l’autre la mafia. C’est un cercle vicieux, dont on n’arrive pas à sortir. »

    En 2008, Oto est restée à Gori, bombardée puis occupée par l’armée russe et pour lui cette loi sur les influences étrangères, c’est un peu le retour de la Russie en Géorgie. Sans les blindés, ni les avions, mais avec le même objectif : éloigner son pays de l’Europe, et l’arrimer à sa zone d’influence.

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    17 May 2024, 10:09 pm
  • 2 minutes 30 seconds
    Les étudiants de Birzeit en Cisjordanie également mobilisés pour Gaza

    Les étudiants toujours mobilisés dans le monde pour dénoncer la guerre à Gaza. Comment leurs actions sont-elles vues dans les territoires palestiniens ? Les jeunes peuvent-ils eux-mêmes manifester ? Reportage dans la plus grande université palestinienne, à Birzeit en Cisjordanie occupée.

    De notre envoyée spéciale à Birzeit,

    C’est la sortie des cours à l’université de Birzeit, sur les hauteurs de Ramallah. De grands bâtiments en pierre abritent plus de 13 000 étudiants, souvent considérés comme la future élite palestinienne. Birzeit est une institution. C’est aussi un lieu de contestation.

    Avec la guerre à Gaza, les jeunes se mobilisent pour dénoncer les massacres contre la population. Rarrat, une étudiante de 21 ans, tient un discours militant « On est actif de plusieurs manières. On fait des manifestations pacifiques ou on va sur les barrages de l’armée israélienne. L’université des martyrs, comme on l’appelle, a un grand rôle à jouer, explique la jeune étudiante. Mais on subit beaucoup de pressions. Et ces pressions ne nous permettent pas de nous mobiliser autant qu’à l’étranger. Beaucoup d’étudiants de l’université de Birzeit ont été arrêtés et sont en prison. Rien n’empêche l’armée israélienne d’entrer dans l’université, ils l’ont fait plusieurs fois. On n’a aucune protection. »

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    Soutenir aussi les Gazaouis dans leurs études 

    L’université de Birzeit est située en territoire occupé et l’armée israélienne y a tous les droits. L’établissement est aussi sous surveillance. Le bloc pro-Hamas est arrivé en tête des élections estudiantines l’an dernier. Mais à Birzeit toutes les sensibilités sont représentées. Certains étudiants préfèrent ne pas manifester et se mobilisent autrement pour apporter leur soutien aux jeunes Gazaouis, comme l’explique Sarah, 20 ans, qui étudie la comptabilité : « On a fait des groupes sur les réseaux pour aider les étudiants de Gaza qui voudraient nous rejoindre après la guerre. Mais on les aide surtout à continuer leurs cours. On leur transfère des crédits internet pour qu’ils assistent aux cours à distance, même s’ils sont à Gaza. On essaie de les soutenir dans leurs études et aussi psychologiquement. Après internet, ça marche quelques minutes, mais après ça coupe. »

    Y-a-t-il encore des étudiants à Gaza, malgré la guerre qui suivent les cours à distance ? « Oui, ça montre qu’ils ont du courage, ils supportent tout de cette situation », ajoute Sarah.

    Les étudiants de Birzeit suivent aussi de près la mobilisation des universités à l’étranger, qu’ils saluent chaleureusement. Islam est étudiant en architecture : « Ça nous intéresse vraiment ce qu’il se passe dans les universités aux États-Unis, en Europe comme en Italie ou en France. On voit comment ils manifestent. Ils s’élèvent contre Israël. Ils font des campagnes de sensibilisation pour les Palestiniens. On apprécie vraiment ce qu’ils font. »

    À Birzeit, les enseignants se sont aussi manifestés. Au début de la guerre, ils ont publié une lettre ouverte, appelant les universités du monde entier à se mobiliser pour Gaza.

    À écouter aussiGaza: face à Israël, l'Afrique du Sud demande à la CIJ d'ordonner un cessez-le-feu

    16 May 2024, 10:06 pm
  • 2 minutes 35 seconds
    Le vol de la libération qui évacue des Gazaouis blessés ou des malades vers Abou Dhabi

    Au huitième mois de la guerre entre le Hamas et Israël, ce conflit d’une violence extrême a déjà fait près de 35 000 morts selon les Nations unies, dont 14 500 enfants. Parmi eux, beaucoup sont décédés faute d’accès aux soins. Pour tenter de sauver quelques vies, plusieurs pays tentent d’organiser des évacuations médicales depuis la frontière entre l’Égypte et la bande de Gaza. C’est notamment le cas des Émirats arabes unis qui ont promis d’accueillir 2 000 Gazaouis blessés ou malades. Alors que le pays a normalisé ses relations avec Israël en 2020, c’est aussi une manière de donner des gages à sa population, très attachée à la cause palestinienne. 

    De notre correspondante dans la région de retour d’Abou Dhabi,

    Aux portes de Gaza, à une quarantaine de kilomètres du poste-frontière de Rafah, des ambulances défilent sur le tarmac de la base militaire d’Al Arich en Égypte. À l’intérieur, 25 Gazaouis grièvement blessés ou malades attendent d’être évacués. Parmi eux, Youssef Abou Chaar, 12 ans. Victime de bombardements israéliens, il a le fémur fracturé et des entailles profondes sur les jambes depuis 3 mois. Allongé sur une civière, l’adolescent serre les dents au moindre mouvement des secouristes pour le hisser sur une plate-forme qui le portera jusqu’à l’avion.

    Transformé en hôpital volant, les sièges de l’appareil ont été repliés pour installer des brancards. Youssef est accompagné par l’une de ses sœurs. Ils sont presque les seuls survivants de leur famille décimée par sept mois de guerre d’une violence inouïe : « On m’a trimballé d’un hôpital à un autre. On m’a opéré sans anesthésie, sans rien. Il n’y a pas de médicaments. On nous a bombardés. On a dû fuir le nord pour aller au sud de Gaza. Ma mère a été tuée, ma sœur aussi, mes trois cousines, mon cousin, ma grand-mère et mon grand-père. » 

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    Des transferts au compte-gouttes

    Comme Youssef, la plupart des enfants dans l’avion ont perdu des proches. Ces transferts autorisés au compte-goutte par Israël ont permis d’envoyer près de 700 patients soignés gratuitement à Abou Dhabi. Maha Barakat, vice-ministre des Affaires étrangères émirienne, chapeaute toutes les missions. Pour elle, la normalisation des relations avec l’état hébreu depuis 2020, facilite les évacuations – si infimes soient-elles. « Nos canaux de communication simplifient l’obtention des permis de déplacement pour les patients. Et en parallèle à ces initiatives humanitaires, il y a bien sûr des efforts diplomatiques pour tenter d’obtenir un cessez-le-feu. » 

    3h30 plus tard, atterrissage à Abou Dhabi. Youssef est directement envoyé aux urgences de la cité médicale Sheikh Shakhbout, le plus grand hôpital du pays. Alex Lambah, chirurgien plastique y soigne le jeune gazaoui. « Salut, Youssef, ça va ? On t’emmène pour changer les pansements ».

    « Il va falloir l’opérer deux fois par semaine. On reçoit beaucoup de patients gazaouis qui ont des plaies ouvertes depuis plusieurs semaines, explique le docteur Alex Lambah. Elles sont souvent très infectées. Ce que je vois sur mes patients de Gaza, c’est une forme très extrême de traumatisme », ajoute le chirurgien.

    D’après le médecin, d’ici quelques mois, Youssef devrait pouvoir de nouveau marcher. Comme lui, à Gaza, un enfant est blessé ou tué toutes les dix minutes d’après l’Unicef.

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    15 May 2024, 10:01 pm
  • 2 minutes 26 seconds
    Italie: le calvaire de migrants emprisonnés car accusés à tort d’être des passeurs

    Ils seraient un millier dans les cellules italiennes. Les migrants présumés passeurs, surnommés les « capitaines » pour avoir participé à la traversée d’une embarcation, sont accusés d’aide à l’immigration illégale, ils passent des mois en prison en Italie. Une criminalisation systématique des exilés pour justifier la politique des frontières de l'extrême-droite, selon les défenseurs des migrants qui dénoncent un acharnement qui s’est accentué sous le gouvernement Meloni, qui a promis de pourchasser les trafiquants. L’an dernier en Europe, c’est en Italie qu’il y a eu le plus de cas de criminalisation. Ciblés, certains de ces « capitaines » décident de se faire entendre et de se battre.

    Le reportage de notre correspondante est à retrouver dans son intégralité dans notre podcast Accent d’Europe.

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    14 May 2024, 10:01 pm
  • 2 minutes 36 seconds
    En Inde, les infrastructures ferroviaires se développent à grande vitesse

    Alors que l'Inde entière est en train de voter pour savoir si elle offre à Narendra Modi un troisième mandat ou pas, tout le monde s'accorde à dire que les infrastructures du pays se sont considérablement améliorées. Le pays construit à toute vitesse pour qu'elles cessent d'être un frein à l'essor de son économie. Les routes et les rails sont en constant développement. Le développement du réseau ferroviaire, avec des lignes de plus en plus rapides et confortables, illustration en reportage dans un train express régional.

    13 May 2024, 11:03 pm
  • 2 minutes 37 seconds
    Irlande: la pénurie de logements combinée à l'immigration n'alimentent pas les discours politiques

    En Irlande, les priorités des citoyens commencent à changer. Le pays manque cruellement de logements. Ce n’est pas nouveau, mais la situation n’a fait qu'empirer et avec l’arrivée de demandeurs d’asile, des mouvements anti-immigrés, avivés par cette pénurie immobilière, émergent. Pourtant, cette colère – fait atypique en Europe – n’est pas exploitée, de manière populiste, par les politiques, y compris pour les élections européennes.

    Un reportage à retrouver en intégralité dans Accents d'Europe.

    13 May 2024, 10:27 am
  • 2 minutes 29 seconds
    Jordanie: la colère des Bdouls expulsés du site historique de Pétra

    Le conflit entre le pouvoir central jordanien et les Bédouins de la tribu des Bdouls de Pétra, est une vieille histoire qui remonte au début des années 1990, lorsque le gouvernement de Jordanie avait exproprié les Bédouins de leurs grottes situées sur le site historique et leur avait offert en dédommagement des maisons en dur dans un village nouvellement créé appelé Oum Sayhoun. Presque 25 ans plus tard, le conflit entre Bdouls et pouvoir central est toujours larvé. Car les Bdouls, bien qu’ils aient accepté de quitter le site, ont continué de s’y rendre pour travailler avec les touristes et gagner de quoi vivre.

    De notre correspondant à Amman,

    Keffiehs enroulés sur la tête et vêtements traditionnels de Bédouins, les Bdouls de Pétra errent en chameau ou en âne à Oum Sayhoum, village situé à l’extérieur du site historique de Pétra construit de toute pièce par le gouvernement pour reloger cette communauté. Tous regardant avec regret et nostalgie comment ils sont passés de propriétaires d'un lieu exceptionnel à étrangers interdits d'entrer sauf avec approbation du gouvernement.

    Le 12 décembre dernier, les autorités jordaniennes ont expulsé des centaines de familles de Bédouins, dont la vieille Fatima, et des dizaines d’autres familles de la tribu bédouine des Bdouls qui occupaient des grottes la journée pour proposer plats locaux en tout genre et moments inoubliables aux visiteurs de passage.

    Depuis quatre mois, Fatima ne peut plus se rendre sur le site et pour elle, c’est insupportable. « Le gouvernement nous a opprimés et nous a forcés mes enfants et moi à fuir hors de Pétra. Nous sommes tous assis ici à la maison sans travail ni moyen de subsistance, et dans ce village, il n’y a rien à part des logements, nous sommes isolés et livrés à nous-mêmes », dénonce Fatima.

    Les archives de RFIPétra, Jordanie, au-delà du tourisme

    « Je resterai là jusqu'à ma mort »

    Malgré l’expulsion des Bdouls du site historique de Pétra, 39 familles vivent toujours dans des grottes. Eux n’ont pas encore été expropriés, mais déplacés dans de nouvelles grottes plus excentrées du Trésor et du monastère. C’est le cas de la famille de Hasna qui y vit sans eau potable, ni électricité, et où il est impossible de tenir debout à l’intérieur.

    « L'eau, c’est notre point faible. Ils l'ont coupée de nos grottes pour nous forcer à quitter Pétra, et nous avons maintenant recours à l'eau potable d'une des sources, qui est elle-même polluée et a causé des maladies pour nous et nos enfants. Mais nous ne sortirons pas d'ici même si nous buvons de l'eau polluée, je resterai là jusqu'à ma mort », clame Hasna.

    À écouter aussiLe royaume nabatéen, premier royaume arabe?

    Le gouvernement jordanien se justifie

    Les autorités gouvernementales jordaniennes ont de leur côté justifié leurs actions en expliquant craindre que Pétra soit inscrite sur la liste des sites menacés du patrimoine mondial de l'Unesco, explique Ismail Abu Amud, chef adjoint de la Commission des réserves et du tourisme.

    « La présence de ces familles dans les grottes est contraire aux idées de l’Unesco et aux lois jordaniennes. L’agence onusienne demande en effet que les Bédouins soient réinstallés dans des vrais logements et qu’on leur offre des opportunités de travail. Il y a actuellement environ 40 familles dans les grottes et nous travaillons actuellement à leur trouver un logement alternatif avant de les expulser de Pétra », avance Ismail Abu Amud.

    Historiquement, les Bdouls travaillaient comme bergers, mais avec le début de l'afflux de touristes dans la ville à la fin des années 1960, ils se sont adaptés en proposant balades et divertissements aux touristes du monde entier. Aujourd’hui, les Bdouls de Pétra sont estimés à environ 3 000 personnes.

    11 May 2024, 11:02 pm
  • 2 minutes 27 seconds
    Espagne: en Catalogne, l'indépendance ne semble plus une priorité

    En Catalogne, les élections régionales ont lieu dimanche 12 mai. Sept ans après la tentative de sécession et après une décennie de majorité indépendantiste au parlement catalan, l’indépendance ne semble plus être une priorité.

    De notre correspondante à Barcelone,

    Indépendance. C’est une rengaine qui résonne dans les meetings et manifestations depuis une décennie dans la région. Mais cette demande n’est désormais plus la principale préoccupation des Catalans, qui se rendront aux urnes ce dimanche.

    Un changement d’ère qu’explique Oriol Bartomeus, politologue à l’ICPS, l'Institut de sciences politiques et sociales : « Même si on dirait qu’on est à la même époque, parce que les personnages sont presque tous les mêmes qu’au moment du processus, en réalité, tant d’un point de vue des électeurs comme des discours des politiques, tout a changé. L’axe du débat n’est plus le même, il s’est ouvert à d’autres sujets, plus “normaux”, entre guillemets. Il n’y a plus un monopole du sujet indépendantiste », décrypte Oriol Bartomeus.

    Un manque de motivation

    Sur scène durant ses meetings, même la figure emblématique de la tentative de sécession de 2017, Carles Puigdemont – candidat de la droite indépendantiste – ne mentionne l’indépendance qu’après 20 minutes de discours. Il reconnait un manque de motivation de son clan : « Il nous manque la joie, on voit que l’humeur est abattue, qu’on manque d’amour-propre et de confiance quant à nos possibilités. Il faut les retrouver », clame l'ancien dirigeant de la Généralité catalane.

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    Même certains indépendantistes de la première heure comme Carles Porta, venu au meeting, ne croient plus qu’ils puissent atteindre leur but à court ou moyen terme : « Cela me semble difficile que les partis s’entendent pour obtenir l’indépendance, c’est difficile avec les leaders qui nous dirigent aujourd’hui », pense Carles Porta.

    Vers une absence de majorité aux élections régionales ?

    Xavier Antich est président de l’association culturelle Òmnium, qui a organisé les plus grandes manifestations du mouvement indépendantiste de ces dernières années. Il partage ce diagnostic : « Le mouvement est découragé, désorienté et démobilisé. Pour nous, d’un côté à cause de la répression espagnole, de l’autre l’incapacité de partis indépendantistes de présenter un projet pour le pays », explique-t-il.

    Après une campagne où il a plutôt été question de sécheresse, de chômage et de logement, les partis indépendantistes pourraient – pour la première fois en 10 ans – ne pas obtenir de majorité parlementaire ce dimanche 12 mai.

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    10 May 2024, 10:25 pm
  • 2 minutes 34 seconds
    Les Maldives se rapprochent de la Chine au détriment de l'Inde

    Aux Maldives, 76 militaires indiens ont été renvoyés du pays, aboutissement d’une politique agressive du nouveau président, Mohammed Muizzu, envers son voisin indien et d’un rapprochement avec la Chine. Ceci fait craindre à l’Inde et aux pays occidentaux de voir un nouveau pays de la région tomber sous l’emprise de Pékin, qui développe sa « nouvelle route de la soie » dans cette partie de l’océan Indien.

    De notre envoyé spécial à Malé,

    C’était la promesse phare du nouveau président, et elle est tenue : ce 10 mai, les 76 militaires indiens, déployés entre autres pour surveiller des eaux territoriales, ont quitté les Maldives. Cette démarche a toutefois jeté un froid entre Malé et New Delhi, ce qui inquiète l’opposition.

    « L’Inde est notre voisin le plus proche. Notre plus grande menace sécuritaire est une catastrophe naturelle ou une marée noire, et c’est alors l’Inde qui nous aiderait. Alors que la Chine, elle, est très loin », observe Mariya Didi, ancienne ministre de la Défense dans le gouvernement précédent.

    Des relations bilatérales avec la Chine au rang de partenariat stratégique

    Ce froid avec l’Inde est remplacé par un réchauffement des relations avec Pékin : le président Mohammed Muizzu s’est déjà rendu en Chine, où il a élevé les relations bilatérales au niveau de partenariat stratégique. Un navire de renseignement chinois a ensuite appareillé dans l’archipel, ce qui inquiète New Delhi, qui craint l’espionnage chinois. Malé refuse toutefois de parler d’alignement avec la Chine.

    « Ce partenariat avec la Chine est surtout économique, pour renforcer la sécurité des touristes chinois et le développement des infrastructures », soutient Ali Naseer, ambassadeur pour le ministère des Affaires étrangères. « Les Maldives se trouvent à une position stratégique et nous recevons beaucoup de demandes d’appareillage de bateaux étrangers. En mars dernier, nous avons ainsi accueilli un navire militaire américain. »

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    Des emprunts chinois risqués

    La Chine investit dans les pays de l’océan Indien pour garantir son approvisionnement en matières premières depuis le Golfe. Mais ceci peut être périlleux : le Sri Lanka a ainsi reçu des prêts généreux de Pékin, mais quand le pays n’a pas pu les rembourser, la Chine a saisi un port stratégique. Les Maldives sont aussi vulnérables. Les emprunts chinois représentent près de 20% du PIB du pays, ce qui est une position risquée selon le FMI.

    Aly Shameem, professeur de relations internationales à l’Université nationale des Maldives, met en garde contre ce piège de la dette. « Les politiciens font des promesses irréalistes pour gagner les élections, et ensuite ils cherchent tout acteur qui puisse financer ces projets. Et c’est alors que les problèmes arrivent. Le président Muizzu parle de construire un tunnel sous l’eau, ce qui est controversé. On voit que chaque dirigeant veut laisser un héritage pour imprimer son nom dans la mémoire des gens. »

    Les Maldives restent dépendantes de l’Inde pour leur alimentation, et New Delhi accepte pour l’instant de maintenir ses exportations de produits essentiels vers l’archipel.

    9 May 2024, 10:30 pm
  • 2 minutes 29 seconds
    Canicule en Thaïlande: les taxi-motos de Bangkok en première ligne

    Vague de chaleur en Asie du Sud-Est. En Thaïlande, les températures atteignent 44° dans plusieurs provinces, 50° ressentis à Bangkok. Une vague qui touche en particulier les plus fragiles, les personnes âgées et surtout les plus pauvres, qui ne disposent pas de l’air conditionné et exercent souvent des métiers qui les obligent à rester dehors.

    De notre correspondante à Bangkok,

    Depuis quelques jours, la chaleur dans les rues de la capitale thaïlandaise est telle qu’il est devenu pénible de sortir de chez soi entre 10 et 18 heures. Ceux qui s’y risquent tentent de se protéger avec des ombrelles, mais beaucoup n’ont pas le choix, comme Pi Neuk, un chauffeur de moto-taxi, maillon essentiel de la chaîne des transports urbains en Thaïlande. À 60 ans, il a déjà fait un malaise qui l’a conduit à l’hôpital, il y a quelques jours, mais le voilà de retour avec, pour affronter la chaleur, les moyens du bord.

    « Vous voyez, j’ai un petit linge mouillé, je le mets sur ma tête pour éviter de refaire un malaise avec cette chaleur, c’est insupportable de faire plus de 500 mètres à moto, sous le soleil. Alors, on ne fait que des petits trajets, donc on gagne moins d’argent aussi, à peine 10 ou 15 euros par jour, on commence à 5 heures du matin. De toute façon, on ne dort pas bien. Le matin, c’est le seul moment où on peut un peu travailler. »

    « Ça nous dépasse »

    Avec trente morts par insolation depuis le mois de janvier, les autorités sanitaires appellent à la vigilance pour les plus fragiles. Somyot est pharmacien, et sa boutique, ne désemplit pas : « Ce qui nous inquiète le plus, ce sont les coups de chaleur, particulièrement pour ceux qui ont des maladies chroniques. Il y a beaucoup de gens qui viennent me voir désemparés. Ils ne savent plus comment supporter la chaleur, surtout ceux qui doivent rester au soleil. Pourtant, les Thaïlandais sont habitués aux fortes températures, mais là, ça nous dépasse. Beaucoup n’arrivent plus à dormir la nuit. Par conséquent, leur santé se détériore. »

    Dans les quartiers populaires, où les habitants n’ont pas la climatisation, il n’y a pas de répit, ni de jour, ni de nuit. Il faut donc se réorganiser pour apprendre à vivre avec la chaleur : « Il faut complètement réorganiser son emploi du temps, explique cette femme d'un quartier pauvre. Se lever à 4 ou 5 heures du matin, travailler, se coucher à 10 heures, redormir un peu aux heures chaudes du milieu de journée, et quand c’est trop dur à supporter, on médite, on entraîne son esprit, pour se refroidir le cœur. »

    La vague de chaleur devrait encore empirer dans les semaines à venir. Déjà une réalité pour la majorité des Thaïlandais, le réchauffement climatique affecte particulièrement l’Asie du Sud-Est, qui pourrait voir les jours d’extrême chaleur passer à 220 par an d’ici une dizaine d’années.

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    8 May 2024, 11:03 pm
  • 2 minutes 34 seconds
    Italie: le parti de la Première ministre met en danger le droit à l'avortement dans certaines régions

    Le 23 avril 2024, le Parlement italien a voté un amendement de Fratelli d’Italia qui permet aux mouvements anti-avortement d’intervenir dans les centres de planning familial. En Émilie-Romagne, où l’accès à l’IVG est garanti, contrairement à de nombreuses régions, la décision du parti de Georgia Meloni provoque l’inquiétude et la colère.  À Modène, l’association féministe Bon Una di Meno prépare pour ce 8 mai, jour de la fête des Mères en Italie, une réunion d'information pour endiguer l'influence de ces groupes.

    De notre correspondante à Modène,

    Le rendez-vous est fixé à l'Eretica, un local associatif dans l'ouest de Modène. Dans la petite salle du premier étage, les militants sont une vingtaine. Premier point à l'ordre du jour, organiser une soirée à destination des femmes pour les informer sur la réalité de l'avortement. Car depuis 6 mois, les groupes dits pro-vie ont été particulièrement actifs à Modène. Pour la première fois en Italie, l'association 40 jours pour la vie a organisé des veillées devant l'hôpital Polyclinico, qui pratique des avortements. Luciana milite depuis près de 10 ans au sein de Non Una di Meno.

    « C'était de 07h00 du matin à 07h00 du soir. Ils n'étaient pas nombreux, mais ils se mettaient là pour prier pendant des heures et une militante sur place nous a également informés qu'ils faisaient signer des pétitions. »

    Les premières veillées ont lieu en octobre et novembre, puis de nouveau en février et mars, soit au total 80 jours de prière anti-avortement au pied de l'hôpital. Le 10 mars dernier, le groupe organise même une assemblée publique sur le syndrome post-avortement. Victoria a assisté à cette conférence opposée à cette théorie des chiffres et des études.

    « Cette conférence paraît essentiellement du syndrome post-avortement. De quoi s'agit-il ? D'un mensonge. Nous nous sommes informés, documentés, et ça n'existe pas. Eux ont comparé ce syndrome post-avortement au syndrome de stress post-traumatique. »

    Des pratiques anti-IVG qui pourraient se généraliser

    En Italie, l'avortement est autorisé par la loi 194 adoptée en 1978. Dans les faits, 63% des gynécologues et des obstétriciens sont objecteurs de conscience pour des raisons religieuses où personnelles. Ils peuvent refuser de pratiquer une interruption volontaire de grossesse ou même de délivrer le certificat médical préalable à une IVG. Dans les Abruzzes, en Basilicate, en Sicile, à Bolzano ou dans le Molise, ce chiffre dépasse les 80%.

    Les centres de consultation familiale jouent alors un rôle clé. En Émilie-Romagne, ils délivrent 70% des certificats médicaux dont les femmes ont besoin avant de pouvoir effectuer une IVG. Victoria : « Nous nous sommes proposés d'accompagner les personnes qui en auraient besoin, d'aider les personnes qui avaient eu de mauvaises expériences, parce que cette situation dans les centres a déstabilisé pas mal de monde. »

    Dans les régions où la coalition gouvernementale est au pouvoir, les associations dites pro-vie ont déjà pénétré les centres de consultation familiale. Dans le Latium ou dans les Marches, des femmes ont dénoncé des entretiens au cours desquels elles avaient été contraintes d'écouter les battements du cœur du fœtus. Avec cet amendement, les militantes craignent que ces pratiques anti-avortement ne se généralisent du nord au sud du pays.

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    7 May 2024, 10:01 pm
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