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Les élections parlementaires au Kurdistan irakien ont eu lieu il y a plus de trois semaines, le 20 octobre, pourtant il n'y a toujours pas de gouvernement en vue. Les tensions entre les deux partis arrivés en tête paralysent la région depuis plusieurs mois déjà et affaiblissent son autonomie au profit de l’État central irakien. Une situation qui inquiète les vieux peshmergas, ces vétérans de la lutte pour l’indépendance du Kurdistan.
De notre envoyé spécial de retour de Slemani, Lucas Lazo
À Slemani, les murs de la vieille prison rouge affichent aujourd’hui les visages des combattants kurdes qui se sont battus dans les années 1980 pour un Kurdistan libéré du régime de Saddam Hussein. Rizgar Ramar, ancien combattant longtemps exilé en France, nous ouvre les portes de ce centre de torture, désormais lieu de mémoire. « J’ai rejoint les peshmergas en 1986, parce que le parti Baas était partout et a massacré les Kurdes. Ils ont détruit beaucoup de villages, se rappelle l'ancien combattant. Le parti Baas a mis mes parents dans la prison de Samawa, dans le sud de l'Irak, pendant deux ans. À l'école, on n'était pas libres. Il ne fallait pas parler de politique… donc, on a combattu le parti Baas. Moi, j'ai perdu un frère. On a perdu beaucoup de copains. Nous, on était un groupe de résistants. On était 40 combattants. Aujourd'hui, on n'est plus que huit. Le reste, ils sont morts au combat. »
Dans le café du musée, les murs résonnent du claquement des dominos sur la table. Rizgar s’y réunit avec ses camarades pour discuter de l’avenir du Kurdistan. La région autonome a tenu des élections fin octobre attendues depuis deux ans. Depuis, les partis kurdes négocient la formation d’un gouvernement, mais cela pourrait prendre du temps. « Comme les partis politiques kurdes ne sont pas très unis, ils sont corrompus, dénonce Rizgar Ramar. J’espère que ça ne sera pas les dernières élections, parce qu’actuellement, l’État central irakien peut tout contrôler. Déjà, il contrôle les salaires, il contrôle le pétrole. Moi, je suis très très pessimiste pour ça. »
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Pour Bagdad, la paralysie des institutions kurdes est une aubaine. Depuis peu, c’est le gouvernement fédéral irakien qui distribue les pensions des peshmergas. Pour Rizgar Ramar, c'est une atteinte insupportable à la souveraineté du Kurdistan : « Je suis pour un pays indépendant pour les Kurdes, et je pense que tous les politiciens kurdes ont trahi, parce que les dirigeants actuels, ils n’ont pas combattu… Ça, c’est très très difficile à accepter. »
Le Kurdistan est dirigé par une nouvelle génération de leaders, dont les divisions affaiblissent l’autonomie de la région gagnée en 1991 après des années de lutte. « Un jour, il y aura un Kurdistan libre, pour nous. Peut-être que c’est un peu loin, mais je suis sûr et certain qu’il y aura un pays libre pour nous », espère le peshmerga.
Pour l’instant, l’urgence est à la formation d’un gouvernement, au risque de voir Bagdad gagner toujours plus d’influence dans la région autonome kurde.
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L’une des facettes du réchauffement climatique dans le bassin méditerranéen, c’est la sécheresse, et dans son sillage, des incendies gigantesques qui dévorent certains territoires à une vitesse vertigineuse. En Italie, la Sicile est la région la plus touchée par les deux phénomènes. L’été 2023 a été celui des incendies record, l’été 2024 celui d’une sécheresse record. Sur place, des initiatives de la société civile voient le jour pour tenter de trouver des solutions. C’est le cas de l’association Fenice Verde, littéralement le Phénix vert.
De notre correspondante à Palerme,
« Deviens un jardinier de la nature », c’est le slogan de l’association Fenice Verde qui propose, pour la première fois, des ateliers de récolte et de conservation de graines autochtones dans les montagnes qui entourent Palerme tous les week-ends de novembre. « On ramasse les graines, on les certifie conformes, on édite un registre pour assurer leur traçabilité, détaille le président de Fenice Verde, Emiliano Farinella. Ensuite, on fait grandir les plantes chez des pépiniéristes et enfin, on les plante dans les zones qui ont été touchées par les incendies. »
Lors de leurs promenades du week-end, les bénévoles de l’association récoltent donc uniquement des graines d’espèces locales les plus résistantes aux flammes des incendies. Elles servent à créer une banque de plasma germinatif pour faire pousser des bébés plantes et les réintroduire sur les terrains brûlés par les incendies après plusieurs années de jachère. « L’idée, c’est de sélectionner des espèces locales pour préserver un génome compatible avec celui des plantes détruites », explique Emiliano Farinella.
Ces plantes détruites, adaptées au climat de plus en plus chaud et de moins en moins pluvieux de la Sicile, sont aussi les meilleurs atouts pour contrer un autre effet du changement climatique dans la région : environ 70 % de la Sicile est exposée au risque de désertification. Cet été, la région a vécu un épisode de sécheresse sans précédent. Or, sécheresses et incendies sont liés.
« Le problème, c’est que la végétation est de plus en plus sèche à l’arrivée de l’été, remarque Davide Borgia, membre de l’association de protection de l’environnement Legambiente, à Messine, de l’autre côté de l’île. Et le plus grave, c’est la sécheresse en automne et en hiver, qui fait qu’il ne pleut pas au moment où justement il devrait pleuvoir. La part de flore sèche est de plus en plus élevée, donc petit à petit, même la végétation d’altitude devient plus vulnérable au feu. »
Mais l’espoir est permis et les incendies ne sont pas une fatalité, même si cela demande des décennies de patience.
Au détour d’un virage, le soleil peine à percer sous les feuillages denses. La voiture s’enfonce dans un sous-bois. Davide Borgia s’arrête au bord de la route. Tout autour, il y a des chênes majestueux. C’est un projet de reboisement lancé 20 ans plus tôt et miraculeusement rescapé des flammes. « Pour un botaniste, pour quelqu’un qui aime la nature, ça réchauffe le cœur parce que c’est la promesse de ce que l’on pourrait avoir à terme, s'enthousiasme Davide Borgia. C’est passionnant à étudier. Il y a un peu moins d’herbe sèche qu’ailleurs, c’est plus frais, on sent qu’il y a de l’eau. Même s’il y avait un incendie, il aurait beaucoup de mal à se propager rapidement. »
La Sicile compte encore près de 500 000 hectares de forêt, soit près de 15 % de son territoire. C’est le taux le plus bas d'Italie, juste après les Pouilles.
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Pour la deuxième année consécutive, l’Allemagne connaîtra cette année une phase de récession. L’industrie automobile, premier employeur industriel du pays avec 800 000 salariés et 564 milliards d’euros de chiffre d'affaires, est particulièrement touchée.
De notre correspondante à Berlin,
Les grands noms du secteur automobile annoncent tous les uns après les autres de mauvais résultats. Notamment Volkswagen, le numéro 1 en Europe. 60 000 salariés travaillent à Wolfsburg, où se trouve le siège du constructeur. La crise chez Volkswagen tient la région en haleine.
Dans l'usine de Wolfsburg, il est presque 14 heures, l’heure du changement d’équipe. Des groupes d’hommes et de femmes sortent, visage fermé, de ce qui ressemble à une bouche de métro. Un écriteau fixé en haut des escaliers indique Tor 17. L’entrée 17 de l’usine, à 200 mètres de la gare, est l’une des plus utilisées par les salariés.
Samia vient de finir sa journée. Fille d’immigré tunisien, cette employée de bureau, doudoune rouge et visage avenant, a connu plus d’une crise chez Volkswagen. « Ce n’était pas comme maintenant, confie-t-elle. Je ne peux pas vraiment dire pourquoi. Mais cette collègue, par exemple, je parlais avec elle tout à l’heure, elle est là depuis 43 ans, elle part cette année à la retraite. Elle disait qu’elle n’avait jamais vu ça. Bien sûr, il y a toujours des solutions. Mais là, ce sont vraiment des solutions violentes. Des licenciements… Il faut voir, les gens ont peur pour leur emploi, pour leur sécurité. »
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Samia s’inquiète notamment pour les salariés des usines d’ex-RDA du groupe, des régions où il sera plus difficile de retrouver un emploi. À Wolfsburg, chaque famille tremble depuis que le constructeur a annoncé début septembre vouloir résilier la garantie de l’emploi négociée avec les syndicats. Des dizaines de milliers de postes sont menacés. Trois usines pourraient fermer en Allemagne, pour la première fois dans l’histoire du groupe.
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Devant la porte 17, l’inquiétude est palpable. Franck, la quarantaine, fils et petit-fils d’ouvriers de l’usine, s’apprête à prendre son poste. « Je travaille dans l’atelier des portes, on pose les câbles, la vitre, les isolants tout autour, le rétroviseur. Le rythme, c'est normalement une minute par geste. Mais comme la production a diminué, on a baissé. On est maintenant à deux minutes », explique cet ouvrier.
Les négociations sur l’avenir du groupe, entre la direction, le puissant comité d’entreprise et le syndicat IG Metall, reprendront le 21 novembre dans le stade Volkswagen de la ville, financé par le constructeur.
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C’est l’un des pays qui accueille le plus d’étudiants étrangers au monde : ils sont près d’un million et représentent une source considérable de revenus pour les universités, parfois jusqu’à 40% de la population estudiantine. Accusés d’aggraver la crise du logement, le gouvernement a décidé de réduire significativement le nombre d’étudiants étrangers au risque de plonger dans la tourmente le secteur de l’éducation tertiaire, poids lourd de l’économie du pays pesant plus de 30 milliards d’euros.
De notre correspondant à Sydney,
Vaches à lait pour les uns, boucs émissaires pour les autres, les étudiants étrangers sont actuellement en Australie au cœur de toutes les discussions. Ils représentent à eux seuls la moitié de tous les immigrés arrivés en Australie en 2023. Ils sont pointés du doigt par certains, qui les estiment responsables de la forte tension sur le marché immobilier. Les loyers ont en effet augmenté de près de 10% en un an dans les grandes villes du pays et la part des logements vacants, à Sydney par exemple, est inférieure à 1%.
Mais pour le spécialiste de l’immigration Abdul Rizvi, le rôle joué par les étudiants étrangers dans cette crise est largement surévalué. « Les étudiants, en général, vivent dans des résidences étudiantes, près des universités, pas dans les banlieues pavillonnaires où la tension est la plus forte sur le marché de la location. Donc oui, ils participent à la pression sur le marché immobilier, mais les accusations à leur encontre sont exagérées. »
Pourtant, le gouvernement a décidé, il y a quelques mois, de plus que doubler le prix des visas étudiants et d’exiger désormais que ces derniers disposent d’au moins 18 000 euros sur leur compte en banque pour obtenir un titre de séjour. Il compte par ailleurs instaurer des quotas et limiter à 270 000 le nombre de visas délivrés l’année prochaine, soit une baisse de plus de 15% par rapport à 2023.
Une catastrophe dont les conséquences se font déjà sentir d’après Luke Sheehy, le président de Universities Australia, qui représente la filière : « Le gouvernement a déjà délivré 60 000 visas de moins au cours des six premiers mois de l’année, ce qui menace 1 400 emplois dans le seul secteur universitaire. Et les quotas annoncés auront un impact sur d’autres emplois. »
Plusieurs universités ont d’ores et déjà annoncé des pertes de plusieurs centaines de millions de dollars et des centaines de suppressions de postes dans l’enseignement et la recherche. Par ailleurs, certains regrettent que le débat n’ait porté que sur l’immigration et pas sur l’éducation, alors qu’elle est directement concernée. C’est le cas par exemple de Nico Louw, chef économiste du Menzies Research Centre : « Dans certaines filières universitaires, il y a 70, 75, voire 80% d’étudiants étrangers, ce qui abaisse la qualité de l’éducation dispensée. Nous pensons que plutôt qu’un quota global, il faudrait fixer des limites par cursus, ce qui permettrait de régler les deux problèmes à la fois, celui de l’éducation et de l’immigration. »
Plusieurs témoignages de professeurs soulignent en effet que face à certains étudiants étrangers au niveau d’anglais faible, ceux-ci ont tendance à simplifier leurs cours. Cette proposition de quotas par filière avait été faite par une commission sénatoriale, Mais elle n’a finalement pas été retenue par le gouvernement, qui compte faire voter ces nouveaux quotas au Parlement à la mi-novembre.
Alors la Grande-Bretagne ferme ses dernières mines de charbon, la Pologne peine à se débarrasser de cette énergie polluante, responsable du changement climatique. Elle reste le premier producteur en Europe, avec 3,5 millions de tonnes extraites chaque année. Plus de la moitié de l’énergie consommée dans le pays provient encore du charbon et l’impact de cette énergie fossile sur la santé des habitants se fait sentir.
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C’est l'un des plus grands défis du monde du sport : 40 marins (34 hommes et 6 femmes) de 11 nationalités différentes partent ce 10 novembre 2024 à l'assaut des océans pour un tour du monde à la voile en solitaire, sans escale et sans assistance sur des monocoques d'un peu plus de 18 mètres. Le top départ du Vendée Globe sera donné à 12h02 TU des Sables-d'Olonne. Les premiers devraient être de retour dans cette ville de la côte atlantique de la France d'ici à deux mois et demi. Mais arriver au bout de cette course est déjà un exploit. Une quête ultime poursuivie par des athlètes très différents. Et point de profil-type : la plus jeune de la flotte a 23 ans, le plus âgé 65, et chacun a de bonnes raisons de se lancer.
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Le 9 novembre 1989, le mur de Berlin, qui divisait la ville durant 28 ans, s'effondrait. La RDA communiste, à l'agonie, allait rapidement se démocratiser. L'histoire s'accélérait et débouchait, en octobre 1990, sur la réunification de l'Allemagne. Cet anniversaire sera célébré ce 9 novembre à Berlin avec de nombreuses festivités. Mais 35 ans après, l'ancienne division du pays laisse toujours des traces. Trois Allemands de l’ex-RDA, de trois générations, livrent leurs sentiments.
Présumé allemand, le titre des mémoires de Vincent von Wroblewsky, reflète la complexe identité de l'octogénaire, né en 1939 en France où ses parents, des communistes allemands anti-nazis, avaient trouvé refuge.
En 1950, sa mère, veuve, rentre dans son pays et choisit par conviction l'Allemagne de l'Est, qui vient d'être créée. Son fils y fait plus tard carrière comme philosophe et traducteur. Il est durant 20 ans membre du Parti communiste : « J'ai été très content que la RDA, avec ses restrictions de toutes les libertés, soit éliminée. Mais je regrette la façon dont ça s'est fait et je regrette les occasions manquées. Dans une union, ce qui serait raisonnable, c'est que chacun apporte ce qu'il a de bon ,et pas qu'un impose tout ce qu'il a à l'autre, auquel il ne reste plus rien de ce qu'il avait. »
Trente-cinq ans plus tard, beaucoup d'Allemands de l'Est se considèrent toujours comme des citoyens de seconde zone. Ils soulignent la large domination des élites de l'Ouest, aujourd'hui encore, dans tous les domaines comme, les salaires et les patrimoines encore inférieurs. La brutale transformation, avec un chômage massif dans les années 1990, a laissé des traces.
Pourtant, la situation est aujourd'hui bien meilleure et les frustrations ne sont pas confirmées par les statistiques positives. Des frustrations et une identité Est qui se transmettent de génération en génération, même chez les plus jeunes.
Theresia Crone, 22 ans, ne partage pas ce sentiment. Sa mère, hostile au régime est-allemand, lui a transmis d'autres valeurs. Mais arrivée à l'Ouest, la jeune femme a été choquée de l'image de l'Est : « La première fois, quand j'ai dit à quelqu'un, que j'avais grandi là-bas, la personne a répondu : "Ah vraiment, tu viens de l'Est ? Ta famille est de l'extrême droite." Il y a 10 ans, ce n'était pas un sujet. »
La jeune femme s'est d'abord engagée au sein du mouvement pour l'environnement Fridays for Future. Aujourd'hui, elle dénonce sur TikTok le danger de l'extrême droite et est victime d'attaques permanentes.
Un danger que dénonce Marko Martin. L'écrivain quinquagénaire, issu d'une famille d'opposants à la RDA, a quitté son pays d'origine quelques mois avant la chute du mur. Pour lui, les mentalités autoritaires d'autrefois expliquent les résultats électoraux d'aujourd'hui à l'Est :
« Presque une majorité vote soit pour une partie extrême droite, soit pour une partie vers (des formations) autoritaires crypto-staliniennes. Et les deux parties ont beaucoup de choses en commun, par exemple l'orientation intereuropéenne, le chauvinisme national. »
Invité par le président de la République Frank-Walter Steinmeier le 7 novembre, Marko Martin a prononcé un discours critique et dérangeant. Il se demandait si le symbole de liberté que représentait la chute du mur de Berlin, et la période qu'elle a ouverte en Allemagne et ailleurs, n'était pas qu'une parenthèse en train de se refermer.
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Après la mort de son chef Yahya Sinouar le 16 octobre, le Hamas a déclaré son refus de libérer les otages sans cessez-le-feu. Parmi eux, six Thaïlandais qui travaillaient dans des kibboutz israéliens sont toujours captifs à Gaza. Ils ont été enlevés le 7 octobre 2023 lors des attaques meurtrières contre Israël. Dans le nord-est pauvre et rural de la Thaïlande, les parents de Watchara Sriaoun, l'un d’entre eux, ne perdent pas espoir quant au retour de leur fils.
Dans la demeure familiale des Sriaoun, la télé tourne en boucle, en attendant la bonne nouvelle : que le Hamas libère Watchara, 32 ans, pour qu'il puisse enfin rentrer chez lui à Ban Kut Yang, un village paisible de la province d'Udon Thani. Pour sa mère Wiwwaeo, l'attente est insoutenable. Les dernières nouvelles du Proche-Orient, qu'elle suit chaque jour, ne la rassurent guère :
« Il y a de plus en plus en plus de violences, on ne sait pas quand la guerre prendra fin. J'ai peur pour mon fils, ça fait plus d'un an qu'il a été kidnappé et que nous sommes sans nouvelle. Que mange-t-il ? Comment dort-il ? Je n'en peux plus d'attendre. »
Depuis l'enlèvement de Watchara le 7 octobre 2023, la famille est bouleversée. Dans le salon, son père est scotché devant le téléviseur à suivre les infos en continu. Le vieil homme a souvent des absences, nous dit sa femme Wiwwaeo : « On pleure presque tous les jours, on dort mal. Mon mari perd la tête depuis qu'il n'a plus de nouvelles de son fils. On l'a emmené trois fois à l'hôpital et il a même fait un AVC. »
Malgré ce quotidien difficile, cette chrétienne raconte comment la foi l'aide à garder espoir : « Sans religion, je serais morte. Chaque dimanche, je me rends à l'église et je prie le Seigneur pour que mon fils revienne ici sain et sauf. »
Surtout, ce qui l'aide à tenir, c'est sa petite-fille de 9 ans. Elle s'appelle Nuu Dee, elle est la fille de Watchara. « La gamine vient de perdre sa mère, emportée il y a deux mois par une maladie, mais elle est forte », répète Wiwwaeo, en regardant avec douceur la fillette aux nattes tressées : « Elle sait que son père est encore en vie, elle prie aussi pour que le Hamas relâche son père et qu'il puisse à nouveau l'amener à l'école et partir en voyage avec elle. »
Watchara avait rejoint Israël en 2020, justement pour offrir à sa fille un avenir plus radieux. Là-bas, il gagnait deux fois plus que dans son village natal et envoyait de l'argent à sa famille endettée. Avant le 7 octobre 2023, 30 000 Thaïlandais travaillaient comme lui dans des fermes ou kibboutz israéliens. La faute aux manques d'opportunités et aux salaires miséreux, selon Wongwian, une élue locale, qui vit dans le village d'à côté :
« Certains n'ont pas d'autre choix que de partir à l'étranger. Les familles thaïlandaises avec un travailleur migrant ont une vie meilleure : ils ont assez d'argent pour s'acheter une maison, un terrain ou une voiture. »
Grâce en partie au salaire que Watchara touchait en Israël, les Sriaoun ont d'ailleurs récemment pu faire construire une maison, celle dans laquelle ils vivent actuellement et que l'otage retenu à Gaza n'a jamais vu terminée. Tous ici espèrent que Watchara pourra voir un jour la nouvelle bâtisse, où une photo de lui aux côtés de toute la famille est accrochée au mur.
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En Ukraine, s'il n'y a pas de chiffres officiels, on estime que 400 000 soldats ukrainiens auraient été blessés depuis le début de la guerre en 2022. Un chiffre qui ne prend pas en compte l'impact psychologique du conflit, dont le stress post-traumatique. Et beaucoup de combattants utilisent le cannabis pour lutter contre l'impact psychologique de la guerre. Depuis la légalisation du cannabis médical dans le pays, plusieurs voix du monde associatif, scientifique et politique se joignent pour demander que la loi élargisse son champ d'application pour permettre de soulager le stress des soldats. Un reportage de notre correspondante à Kiev.
Un reportage à retrouver dans Accents d'Europe.
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Aides financières à l’Ukraine, politiques migratoires, ou gestion de la dette, les décisions sur ces sujets clivants passent par le Congrès, composé du Sénat et de la Chambre des représentants. Sur les 435 sièges de la chambre basse, renouvelés en novembre, seuls une quarantaine sont jugés « compétitifs », c’est-à-dire que la course est serrée entre candidats démocrates et républicains. Dans la première circonscription de Caroline du Nord, le démocrate sortant Don Davis pourrait ainsi perdre son siège face à Laurie Buckhout, républicaine. Dans toute la région, les démocrates se mobilisent pour remporter cette élection.
De notre envoyé spécial à Henderson,
Tom, 62 ans, est venu de Virginie, État voisin de la Caroline du Nord, pour tracter, certes pour Kamala Harris, mais aussi pour d’autres candidats de cette région rurale, dont le démocrate Don Davis, qui se représente à la Chambre des représentants pour la première circonscription de la Caroline du Nord. « La seule course qui a des conséquences pour moi, c'est la présidentielle, opine Tom, cela étant dit, je sais qu’avec Don Davis, c’est une course-clé pour que les démocrates aient le contrôle du Congrès. Kamala Harris aura beaucoup de mal à faire quoi que ce soit si elle n’a pas le Congrès avec elle, donc c’est sûrement le deuxième scrutin le plus important pour moi. »
Un constat partagé par Rachel. Cette militante regrette la polarisation de la politique où un dialogue entre les deux partis au Congrès est impossible. C’est pourquoi une majorité démocrate est d’autant plus importante, selon elle. « J’ai l’impression qu’on est coincés : le président peut avoir une idée pour réduire la dette étudiante ou pour améliorer la situation pour les migrants, et ils sont coincés, car le Congrès ne passera rien, se désole-t-elle. Ou quand le Congrès et les deux partis se sont finalement mis d’accord sur une loi sur l’immigration, Donald Trump a tout bloqué afin d’éviter que les gens pensent que la situation s’était améliorée avant l’élection… On est juste bloqués et on ne peut pas aller de l’avant. »
Don Davis avait été élu il y a deux ans avec 52 % des voix, mais les contours de sa circonscription ont depuis été redessinées par les républicains au pouvoir en Caroline du Nord, rendant cette élection gagnable pour la candidate républicaine, Laurie Buckhout. En effet, l’électorat est désormais divisé à cinquante-cinquante entre les deux partis.
Dans un QG démocrate local, Ben Lauwrence, soixante ans, véritable vétéran de la politique locale, apprécie particulièrement le programme du candidat démocrate. « Don Davis est juste en faveur des droits humains, il fait aussi campagne pour avoir des frontières plus fermées. C’est un militant qui se fait entendre pour les droits humains, les droits des femmes, les droits reproductifs et les droits de vote. C’est essentiel pour nous », confie Ben Lawrence, pour qui le programme du candidat démocrate est à la fois centriste et progressiste.
Un bon signe pour le candidat démocrate : début octobre, sa campagne avait récolté 5,2 millions de dollars, contre 3,9 millions de dollars chez sa rivale républicaine — dont 1,6 million qu’elle a financé elle-même.
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L’élection présidentielle aux États-Unis pourrait se jouer en Pennsylvanie, cet État industriel du Midwest. C’est le plus important des swing states, avec 19 grands électeurs en jeu. Voilà pourquoi Kamala Harris et Donald Trump multiplient les déplacements dans cet État que Joe Biden avait remporté de justesse en 2020. La région industrielle autour de Pittsburgh, autrefois bastion démocrate, est désormais tournée vers les républicains.
De notre envoyé spécial à West Mifflin,
Au bord de l’autoroute qui mène de Pittsburgh à West Mifflin, Natalie et son mari tiennent un stand permanent de produits dérivés de Donald Trump.
On y trouve des T-shirts, des casquettes, des mugs et d’autres accessoires « MAGA » (« Make America Great Again », le slogan de la campagne de Donald Trump). La tentative d’assassinat contre le candidat républicain en juillet dernier a dopé leurs affaires, explique Natalie, qui soutient Donald Trump depuis 2016. « Le lendemain de l’attentat, lorsque nous avons ouvert notre stand, il y avait déjà une queue d’environ 50 mètres. Elle n’a pas diminué de toute la journée ! Nous avons dû fermer plus tôt parce que nous avions tout vendu. » Et à quelques jours de l’élection, le stand attire toujours du monde. Mike, un ancien militaire, vient acheter une pancarte portant le slogan « Les vétérans pour Trump ».
Mike ne rêve que d’une chose : le retour de Donald Trump. Comme beaucoup de ses partisans, il affirme qu’il vivait mieux sous sa présidence de 2016 à 2020. Il reproche à l’administration Biden d’avoir laissé entrer trop de migrants illégaux, dont la moitié, selon lui, « seraient des terroristes potentiels ». Une rhétorique typiquement trumpiste.
Mais ce n’est pas seulement l’immigration qui préoccupe ce vétéran. L’inflation, il l’impute entièrement à l’administration Biden. Tout a augmenté, dit-il : le prix de l’essence, les impôts, les taux d’intérêt, sans parler des produits alimentaires. « Il y a quatre ans, 12 œufs coûtaient environ un dollar. Aujourd’hui, c’est le triple ! » Mike estime que si Donald Trump ne revient pas au pouvoir, « on finira comme un des pays socialistes en Europe ».
Mais justement, comment relancer l’économie locale dans cette région où battait autrefois le cœur de l’industrie sidérurgique américaine ? Les syndicats soutiennent le rachat du groupe sidérurgique US Steel par le géant japonais Nippon Steel, espérant ainsi protéger des emplois.
Mais ce projet est devenu un sujet électoral brûlant, car les deux candidats à la présidence s’y opposent. Ils refusent que cette compagnie passe sous contrôle étranger. Une décision incompréhensible pour Chris Kelly, le maire de West Mifflin. Ce fils d’ouvrier, né à Homestead, a vu la grandeur et le déclin de la sidérurgie dans la région. Il se bat aujourd’hui pour préserver les emplois dans sa ville, qui est le siège d’une usine de transformation d’acier d'US Steel qui compte environ 900 employés. Selon le maire, « la fusion pourrait attirer 10 000 à 15 000 ouvriers qui auront besoin de se loger, de manger. Cela créerait des emplois ! » L’inquiétude d’être licenciés si la fusion ne se fait pas est grande chez les employés d’US Steel. « Ce sont surtout les femmes qui m’appellent. Elles me demandent : comment je vais faire pour payer le crédit de la maison et les frais scolaires ? », explique Chris Kelly.
Chris Kelly ne sait pas comment le conflit autour de la fusion influencera le vote. Il y a quatre ans, sa ville de West Mifflin avait préféré Joe Biden à Donald Trump, mais le candidat républicain s’était imposé dans l’ensemble du comté de Washington voisin, notamment grâce au soutien d’électeurs comme Jason White.
Ancien ouvrier du charbon, Jason s’est reconverti dans l’agriculture. Autrefois fervent démocrate, il se sent aujourd’hui abandonné par son parti. « Notre gouverneur vient d’annoncer un investissement de 600 millions de dollars pour Pittsburgh. Et que fait-on pour la région ? En fait, ils ignorent les besoins des gens et de l’industrie ici. » Jason White ne peut plus voter pour les démocrates : « Ce parti est devenu trop extrême sur des questions d’identité sexuelle », dit-il.
Dans ce comté, il est rare de voir des pancartes pro-Harris devant les maisons. La plupart des habitants affichent ouvertement leur soutien à Donald Trump.
Cependant, certains républicains ont décidé de voter pour Kamala Harris. C’est le cas d’Augusta Doll, surnommée « Queen », originaire du Nigeria. Propriétaire d’une épicerie à Charleroi, le Queen’s Market, elle reproche à Donald Trump son discours anti-immigration. « La plupart de mes clients sont des Haïtiens, j’emploie des Haïtiens, ils travaillent très bien. Si Trump veut tous les expulser, je peux fermer mon magasin », explique-t-elle. « Avant l’arrivée des immigrants, Charleroi était une ville fantôme, ils l’ont revitalisée », confie une habitante sous anonymat, car, selon elle, « ma position n’est pas majoritaire à Charleroi ».
Assis devant un bar à cigares près de Charleroi, nous rencontrons Frederick, ancien officier de police et fervent partisan de Donald Trump. « Si Kamala Harris gagne l’élection, on est foutus », affirme-t-il. Le jour du vote, il compte se rendre aux urnes vêtu d’un sac-poubelle, en réponse à Joe Biden qui avait qualifié les partisans de Trump d’« ordures ».
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