Céréales, minerais ou pétrole, les ressources naturelles sont au cœur de l’économie. Chaque jour, la chronique des matières premières décrypte les tendances de ces marchés souvent méconnus. Diffusions : 06h18, 08h52 (sauf Afrique) et 13h24, 18h35 heure de Paris. Retrouvez les sujets traités par cette émission sur RFI SAVOIRS = http://savoirs.rfi.fr/
Le Mozambique attend toujours les résultats définitifs de ses élections générales du 9 octobre. Le Conseil constitutionnel doit les annoncer cette semaine. Les résultats provisoires sont toujours contestés par le candidat de l’opposition, Venâncio Mondlane, qui entretient depuis deux mois une vive protestation. Routes bloquées, frontières fermées, l’impact est important pour les exportations de matières premières de la région.
Principal pays touché par l’instabilité mozambicaine : l’Afrique du Sud voisine et notamment son secteur du chrome. Extrait dans le nord-est du pays, c’est par le port de Maputo, la capitale du Mozambique, que ce minerai est exporté. Or, depuis le début de la crise, le poste frontière de Lebombo, entre les deux pays, est régulièrement fermé au fret.
Cette situation a notamment fait l’objet d’une rencontre ministérielle entre les deux pays, la semaine passée, à Malelane, en Afrique du Sud. Dans un communiqué conjoint, Maputo et Pretoria, se sont engagés à « sécuriser les infrastructures […] afin de garantir un minimum de perturbations du commerce régional et transfrontalier ».
Selon, Gavin Kelly, président de l’Association sud-africaine du fret routier, la fermeture de la frontière mozambicaine coûte chaque jour 550 000 dollars à l’économie d’Afrique du Sud.
En août, les exportations sud-africaines de chrome dépassaient le million et demi de tonnes, selon la Bourse de Shanghai. Leur niveau annuel avait jusque-là atteint des records, mais la crise mozambicaine risque d’enrayer cette hausse.
Autre secteur en difficulté : le sucre de l’Eswatini. Voisin du Mozambique, dépourvu d’accès à la mer, ce petit pays d’Afrique australe utilise le port de Maputo, pour ses exportations. Les blocages routiers de l’autre côté de la frontière ont déjà causé de nombreuses perturbations, selon l’ESA, l’Association du sucre de l’Eswatini.
Les producteurs songent à se replier sur le port de Durban, au nord de l’Afrique du Sud. « Mais cela coûtera plus cher, explique Nontobeko Mabuza, responsable de plaidoyer à l’Esa. Et cela mettra à rude épreuve nos infrastructures de transport » conclut-elle.
Le sucre représente le deuxième produit d’exportation de l’Eswatini. L’année dernière, 26 000 tonnes ont été envoyées à l’étranger, notamment aux États-Unis, pour 305 millions de dollars.
Gallium, tungstène, titane... l'Otan a listé 12 matières premières essentielles au secteur de la défense. C'est la première fois que l'organisme établit une liste de ce genre et c'est une preuve que le sujet « monte ». Mais le défi est que cette liste débouche sur la constitution de stocks stratégiques dans les pays où il n'y en a pas, comme en France par exemple.
Le plus connu, l'aluminium, entre dans la composition des avions et des missiles. Le graphite est utilisé dans la production de chars de combat et dans les sous-marins. Le cobalt, lui, sert à fabriquer de superalliages utilisés dans les moteurs à réaction. Et comme ça, il y en a douze. Douze métaux et minerais listés par l'Otan, qui sont jugés essentiels. Ce ne sont d'ailleurs pas les seuls, car la liste est en réalité plus longue, mais les absents, comme le rhénium — incontournable pour les turbines aéronautiques — sont moins exposés à un risque géopolitique.
À quoi peut maintenant mener cette nouvelle liste ? L'Otan ne dispose pas de moyens industriels ni de capacités propres de stockage, mais l'idée affichée par l'Alliance est de mettre en place « des chaînes d'approvisionnement plus solides et mieux protégées ».
Dans les faits, cette nouvelle liste s'adresse aux pays membres de l'Otan qui sont très inégaux sur le sujet : les États-Unis sont les seuls au sein de l'organisation à avoir développé une stratégie de stockage de métaux et minerais critiques. Et rien ne dit qu'aujourd'hui les autres membres vont s'y mettre.
Cela fait plus de 15 ans en effet que l'Union européenne publie, elle aussi, des listes de matières critiques, pointe Raphaël Danino-Perraud, chercheur associé à l'Institut français des relations internationales (Ifri), mais à ce jour, les pays membres ont pris peu d'initiatives industrielles, et encore moins développé de coordination entre eux sur le sujet. Le stockage, qui n'est qu'une des composantes de la stratégie globale que les États pourraient mettre en place, n'a pas non plus progressé. En France, plus aucune initiative concrète n'a vu le jour depuis la dissolution de la Caisse française des matières premières en 1996.
Ce qui pêche aujourd'hui, c'est l'absence de compétence, pointe l'expert, face à la complexité du sujet ainsi qu'un manque de moyens dédiés à l'analyse des vulnérabilités de chaque maillon de la chaîne.
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« À un moment, il faut passer à l'action et acheter des métaux tout simplement ! Et si possible acheter quand les prix sont bas », complète Vincent Donnen, patron de la Compagnie des métaux rares (CDMR), société de conseil spécialisée dans les métaux critiques.
« Avec 100 millions d'euros, on peut déjà constituer un premier stock », assure l'expert. Un stock au service des industriels, qui serait soutenu par les pouvoirs publics, à l'image de ce qui existe déjà au Japon, en Chine ou encore en Corée du Sud.
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Le transport de gaz naturel liquéfié en pleine crise : les commandes de navires ont explosé ces dernières années, mais les échanges commerciaux n’ont pas suivi la même courbe. Cette surcapacité a fait sombrer les coûts de ces méthaniers.
Le nombre de navires en circuit ou en construction est affolant : en plus des 650 méthaniers en service l’année passée, 68 ont complété la flotte en 2024, et le rythme de mises sur le marché va encore s’accélérer jusqu’en 2027. « Plus de 50% de la flotte de GNL est encore sur des bons de commandes », résume un expert. Le décalage est aujourd'hui si grand entre la flotte et le marché du gaz naturel liquéfié que certains analystes annoncent un hiver aux allures de « fiasco ».
L’appétit des constructeurs a été aiguisé d'abord par les taux de fret très hauts de ces dernières années. Le début de la guerre en Ukraine a ensuite poussé les armateurs à multiplier les commandes de transporteurs de GNL pour pallier le manque de gaz naturel russe qui n’arriverait plus en Europe.
Or le développement des terminaux de GNL a pris du retard et les volumes commercialisables ne sont pas au rendez-vous : les quantités exportées cette année n’auraient augmenté que de 1%, contrairement à une croissance de 6 à 8% les dernières années. En parallèle, la demande européenne a été plus basse que prévu, en raison de stocks confortables et d’un hiver passé relativement doux.
Les mois qui viennent s’annoncent difficiles pour certaines sociétés, avec des navires qui sont mis au chômage technique et d’autres dont les marges bénéficiaires deviennent négatives. Car les taux de fret se sont effondrés et sont passés sous les coûts de fonctionnement ces dernières semaines pour les plus anciens navires.
Entre octobre et novembre, les tarifs spots moyens ont, par exemple, baissé de 50% pour les méthaniers équipés de turbines à vapeur, les moins efficaces donc, et la chute se poursuit encore ces jours-ci, selon les données du courtier Clarksons. « Ces bateaux-là perdent aujourd’hui beaucoup d’argent », confirme un interlocuteur, contrairement aux plus modernes qui s’en sortent mieux.
Ces navires déjà techniquement obsolètes le sont aussi maintenant sur un plan économique, pour le directeur de Flex LNG société spécialisée dans le transport de GNL. Leur démolition ou leur recyclage pourrait, dans ce contexte exceptionnel, être questionné plus rapidement que prévu, dès qu’ils ne seront plus sous contrat.
La dégringolade des taux de fret n’affecte pas directement les prix du GNL, qui eux évoluent en sens inverse en ce moment. Ils sont portés par le manque d’offres disponibles et par une demande en hausse en Europe. Certains opérateurs chinois bien approvisionnés ont décidé d’en profiter et revendent une partie de leur stock pour profiter des prix hauts, selon l’agence Bloomberg, qui cite des initiatives de PetroChina et de la société publique Cnooc.
Rio Tinto confirme un peu plus sa stratégie « lithium » avec un nouvel investissement de 2,5 milliards de dollars en Argentine. Le géant minier parie sur un rebond des prix du métal pour l'instant très bas, en raison d'une demande du secteur des batteries électriques qui patine.
Les prix du lithium ont chuté cette année de 30%, mais Rio Tinto continue d'investir toujours plus dans ce métal clé pour les batteries des voitures électriques, faisant fi des déboires des autres miniers.
Les unes après les autres, les sociétés voient leur valeur chuter. Au troisième trimestre 2024, Albemarle, le plus grand producteur de lithium, a annoncé une perte de plus d'un milliard de dollars. Le numéro 1 américain a dû réduire ses coûts et suspendre son projet de construction de raffinerie de lithium en Caroline du Sud. Avant lui, plusieurs miniers chinois avaient encaissé des pertes importantes, au premier semestre.
Mais malgré ces difficultés économiques, Rio Tinto sait que l'avenir sera porteur, car dès que la demande du secteur automobile repartira, « les prix du lithium seront réglés », résume Michel Jebrak spécialiste en ressources minérales et co-auteur du livre Objectif lithium (Editions MultiMondes).
En attendant Rio Tinto, qui engrange des bénéfices grâce au cours actuels du cuivre et de l'or, profite du cycle bas des prix du lithium et d'une période propice aux négociations : il y a deux mois, le groupe a racheté l'américain Arcadium pour 6,7 milliards de dollars, une acquisition qui s'ajoute à celle du projet Rincon, en 2022, pour 825 millions de dollars en Argentine.
C'est ce site qui va bénéficier d'un nouvel investissement de plus de deux milliards de dollars pour agrandir la première production de lithium à l'échelle commerciale du groupe. Objectif : financer une nouvelle usine de traitement pour atteindre une production de 60 000 tonnes par an de lithium, de la qualité nécessaire aux batteries, d'ici à 2031.
La volonté de Rio Tinto est clairement affichée : devenir l'un des principaux producteurs de lithium au monde. Avec en plus le scandium et l'aluminium, tous les métaux d'une éolienne font désormais partie du portefeuille du groupe, résume Michel Jebrak. Un pari sur l'avenir là aussi.
La nouvelle flambée des prix du cacao initiée il y a un mois et demi se poursuit. Elle est alimentée par des inquiétudes sur la production au Ghana et en Cote d'Ivoire. Et ce même si la récolte cette année s'annonce meilleure que celle de l'année dernière, qui avait chuté d'un quart chez les deux leaders mondiaux de la fève.
Bien malin celui qui saura dire si les cours grimperont jusqu'à 12 000 dollars la tonne, leur sommet historique d'avril, et si oui à quelle vitesse ce niveau sera atteint. Mais la hausse rapide constatée depuis début novembre illustre un vrai stress des marchés. Ce qui provoque cet emballement des prix, c'est essentiellement l'inquiétude sur la production chez les deux leaders mondiaux : la Cote d'Ivoire et le Ghana.
L'un des indicateurs de référence pour évaluer la récolte, c'est le volume de fèves arrivé au port d'Abidjan et de San Pedro, avant expédition. Il est cette année plus élevé que l'année dernière - +34%, soit 187 000 tonnes de plus en fin de première semaine de décembre selon les statistiques rapportées par l’Organisation internationales du cacao (ICCO) - mais 10% plus faibles qu'il y a deux ans. «Il y a un retour à des quantités substantielles, mais pas records» résume le patron de l'ICCO. Les 10% qui manquent suffisent manifestement à inquiéter les opérateurs. Car cette année, plus que d'autres, une partie de la récolte va être utilisée pour honorer un nombre inconnu de contrats qui n'ont pas pu l'être l'année dernière, faute de fèves.
Toute la question est donc de savoir si la récolte 2024/2025 qui est en cours suffira à combler le déficit passé et à assurer les besoins de cette année. Les prix actuels traduisent cette inquiétude d'approvisionnement, à laquelle il faut ajouter des stocks qui diminuent. On parle là des stocks mondiaux, dans les entrepôts des pays producteurs et à destination, c'est-à-dire notamment les stocks portuaires à Anvers, Hambourg et Amsterdam, les stocks chez les industriels et ceux qui flottent en mer.
S'ils sont importants c'est que ces stocks servent de soupape pour compenser une baisse de l'offre. Aujourd'hui, ils seraient équivalents à 3 ou 4 quatre mois de consommation, selon les estimations. S'ils passent sous la barre des trois mois, et ce pourrait être le cas lors du prochain calcul communiqué en février 2025 par l'ICCO, la tension pourrait s'amplifier et les prix grimper un peu plus.
La baisse de l’utilisation de cuir est une tendance mondiale, tous secteurs confondus (habillement, chaussures ou encore automobile) qui s'accompagne depuis plusieurs mois d'un ralentissement de la demande chez le premier acheteur mondial, la Chine. Une situation difficile pour la filière et en particulier pour le premier exportateur européen de cuirs et peaux brutes : la France.
La tendance de fond est à la baisse de la demande. Les constructeurs automobiles, par exemple, questionnent l'utilisation du cuir dans leurs véhicules, au profit de matériaux moins coûteux. L’intention a été affichée par plusieurs industriels même si elle peine encore à se concrétiser, mais cette tendance n'annonce rien de bon pour le secteur.
Il y a aussi des effets conjoncturels liés à la situation économique et géopolitique mondiale, qui rendent les investissements plus rares. Et puis, il y a la Chine, le « vrai sujet » aujourd’hui, confie Marc Brunel, directeur général de l’Alliance France cuir, car la demande chinoise est cruciale dans ce secteur comme dans tant d’autres.
Les exportations françaises de cuir et peaux brutes - non traitées, non tannées - vers la Chine ont augmenté de 8% (en valeur) cette année, mais les exportations de cuir fini vers le pays, elles, se sont effondrées de 31% alors que l’année dernière, elles avaient augmenté de 84%. « La Chine achète toujours de la matière brute qu’elle peut travailler dans ses tanneries, aussi bien pour le marché du luxe, localement, que pour le milieu et le bas de gamme, à l’international. Les cuirs finis haut-de-gamme déjà valorisés en Europe ont, eux, plus de mal à se vendre », explique Marc Brunel.
Ce ralentissement du marché n'est pas sans répercussion dans les pays exportateurs. L’affaiblissement de la demande internationale a ainsi fait reculer en moyenne de 4% l’activité de la tannerie mégisserie en France.
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Les difficultés du marché se répercutent sur les prix des cuirs et des peaux bruts qui ont baissé en moyenne de 40% depuis 2018, pour les peaux et les cuirs bruts, selon l'Alliance France cuir. Il y a cependant de grandes disparités de prix selon les types de peaux, le marché étant par exemple beaucoup plus tendu sur les peaux de veau, une spécialité européenne.
Ces prix semblent pour l'instant ne pas être influencés par la baisse du cheptel européen. Mais l'offre et le marché pourraient être impactés dans les prochaines années par une nouvelle donne : le changement des habitudes alimentaires. En France, on constate une baisse des élevages de races dites « à viande » au profit des races laitières. Or ces races fournissent des peaux plus fines et moins grandes, qui trouvent moins de débouchés en Europe.
Le cheptel français est aujourd’hui constitué pour 60% de races à viande et 40% de races laitières, mais le jour où les proportions s'inverseront, ce sera un changement majeur pour la filière du cuir qui réfléchit déjà à des stratégies d'adaptation.
Malgré les crises qui s’enchaînent, les prix du pétrole oscillent toujours entre 70 et 75 dollars le baril. L’explication est à chercher du côté de l’arrêt brutal de la croissance de la demande en Chine cette année, mais aussi du côté d’une production en hausse dans les pays non membres de l’Opep+.
Moins de demande d’un côté, plus d’offre de l’autre, l’équation finale donnera bien un marché en surabondance en 2025, c’est ce que confirme le dernier rapport sur le sujet de l’Agence internationale de l’énergie (AIE).
L’AIE a évalué ce surplus à 950 000 barils par jour. Ce chiffre pourrait même augmenter à 1,4 million de barils si l’Opep+, qui garde d’importants volumes sous terre depuis des mois pour éviter une débâcle des cours, réintroduit progressivement des barils sur le marché à partir d’avril, comme le prévoit le dernier calendrier, revu déjà à trois reprises.
Cet excédent de pétrole est lié d’abord à l’offre. Certains membres de l’Opep+ ne respectent en effet pas leurs engagements et persistent à produire plus qu’ils ne devraient. Et puis il y a surtout les pays qui ne sont pas membres de l’Organisation qui, eux, en profitent pour ouvrir généreusement le robinet et prendre des parts de marché.
En tête de ces producteurs, on trouve les États-Unis, mais aussi le Brésil, le Canada, le Guyana et l’Argentine. Selon l’AIE, les pays non membres de l’Opep+ ont mis environ 1,5 million de barils supplémentaires par jour sur le marché ces deux dernières années. Ce sont ces pays qui contribuent le plus à augmenter l’offre sur le marché.
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Le problème, c'est que tout ce pétrole brut ne trouve pas preneur. L’essoufflement de la croissance économique mondiale pèse sur la demande. Le premier acheteur, la Chine, a vu sa consommation croître beaucoup moins que prévu. C’est également le cas dans d’autres pays émergents, tels que le Nigeria, le Pakistan, l’Indonésie, l’Afrique du Sud et l’Argentine, selon l’AIE.
En 2025, ce n’est d’ailleurs pas la consommation de carburant pour les transports qui sera le moteur de la hausse des besoins, mais l’industrie pétrochimique : la demande de naphta, un dérivé du pétrole qui permet de produire de l’éthylène et du propylène, utilisés pour la fabrication de matières plastiques, devrait bondir de 4 % l’année prochaine.
La surabondance qui se profile l’année prochaine se reflète dans les cours : les marchés restent globalement calmes malgré les incertitudes géopolitiques au Proche et Moyen-Orient, les nouvelles sanctions européennes contre la flotte fantôme russe et les perspectives de relance économique chinoise.
À écouter dans C'est pas du ventTraité sur le plastique : il y en a partout, c’est la panique !
Les quantités de coton produites sont connues pour cette campagne de commercialisation 2024-2025 : il y aura plus de coton que de demande. Ce qui veut dire que forcément, certains pays producteurs vont avoir du mal à se faire une place sur un marché très concurrentiel. On pense en particulier aux pays d’Afrique de l’Ouest.
La demande n’est pas à la hauteur de la production : trop limitée ou trop aléatoire, elle n’est clairement pas suffisante aux yeux des négociants et des exportateurs de coton.
Les filateurs ne se précipitent pas aux portes des pays producteurs. À part ceux du Pakistan qui cherchent du coton partout, en raison d’une faible récolte, les autres préfèrent attendre. C’est particulièrement vrai au Bangladesh, le deuxième acheteur de coton dans le monde.
À écouter dans l'Invité d'Afrique midi«Le challenge du coton africain est de trouver de nouveaux débouchés en Afrique même»
Le pays est miné par l’inflation, les filatures hyper-endettées : plusieurs usines ont été mises en vente, officiellement parce qu’elles ne sont pas rentables et n’arrivent pas à rembourser leurs emprunts. Ces usines, en difficulté ou à l’arrêt, sont autant de clients qui n’achèteront plus ou achèteront moins de coton africain. Or le Bangladesh absorbe 70 % de l’or blanc du continent.
Quand la demande faiblit, les prix sont tirés vers le bas ou ne remontent pas. Pour le coton, cela se traduit par un marché qui fait le yoyo autour de 0,70 dollar par livre depuis plusieurs mois. Et c’est là le deuxième problème qui se pose au coton ouest-africain.
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Sur le continent, les prix garantis aux planteurs ont été décidés très tôt dans la saison, quand les cours internationaux étaient beaucoup plus élevés. Supérieurs ou égaux à 300 FCFA pour un kilo de coton-graine, chez la plupart des producteurs, ces prix se retrouvent aujourd’hui en décalage avec les cours qui ont baissé.
Les sociétés cotonnières qui exportent peinent à trouver des clients qui proposent des prix supérieurs au prix de revient de leur coton — sur lequel pèsent aussi les coûts du carburant et du stockage qui ont augmenté. Résultat : les appels d’offres infructueux se multiplient.
La campagne de commercialisation s’annonce donc compliquée, d’autant qu’elle démarre avec des invendus de la saison dernière : il resterait en Afrique de l’Ouest plusieurs dizaines de milliers de tonnes non exportées.
Dans le contexte mondial actuel, le pays qui s’en sort le mieux n’est pas situé sur le continent africain : il s’agit du Brésil. Son coton très compétitif « continue de se vendre largement sur tous les marchés, notamment en Chine et au Vietnam », selon le négociant Mambo Commodities.
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Le renversement du pouvoir en Syrie peut-il avoir des répercussions sur les flux commerciaux et en particulier sur les exportations de phosphate, un minerai essentiellement utilisé pour fabriquer des engrais phosphatés (DAP, MAP, TSP, SSP, NPK) ? C'est la question que l'Inde, la Grèce, la Serbie, l'Iran et la Russie doivent probablement être en train de se poser.
Le phosphate produit dans la région de Palmyre est une source importante de revenus pour la Syrie et pour ceux qui l'achètent et le revendent. Car la Syrie ne commercialisait ces dernières années qu'environ un tiers de sa production. Les deux autres tiers étaient destinés à l'Iran pour sa consommation intérieure, mais aussi à la Russie pour être revendus.
La Russie a été un pilier du redémarrage du secteur après un arrêt total des ventes au début de la guerre en 2011. C'est grâce à l'intervention de Stroytransgaz, une société russe d'ingénierie et de construction, que le commerce a pu reprendre il y a quelques années.
Jusqu'à ce début décembre, l'essentiel du phosphate syrien était exporté via le port de Tartous, même si certaines cargaisons sont suspectées d'avoir transité via le port de Tripoli au Liban, pour gagner en respectabilité avant d'être exportées vers des pays européens.
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La nouvelle donne pourrait redistribuer les cartes de l'approvisionnement, mais quel sera vraiment l'impact sur les flux et les prix dans les prochaines semaines ? Même du côté des négociants en engrais, on peine à répondre.
En termes de poids sur le marché, la Syrie, c'est 2,5 millions de tonnes d'exportation cette année, c'est-à-dire moins qu'avant le début de la guerre, moins que les 4 millions de tonnes qui partent d'Égypte ou encore de Jordanie, et encore moins que les 8 millions de tonnes que le Maroc devrait exporter cette année, mais la Syrie ne pèse pas rien, elle alimente plus ou moins 10 % du marché, estime un négociant français.
Outre son prix bon marché, le phosphate a bonne réputation en Europe, en raison de sa très faible teneur en cadmium, un métal cancérogène.
Il y a donc de nombreux clients potentiellement en stress aujourd'hui de se voir couper temporairement d'une de leurs sources d'approvisionnement ou de revenus. Ceux qui ont le plus à perdre sont l'Iran et la Russie, mais on peut citer aussi la Serbie et la Grèce qui ont importé sur les neuf premiers mois de l'année respectivement 500 000 tonnes et 250 000 tonnes de phosphate syrien.
Parmi les autres acteurs qui comptent, il y a la Chine pour qui l'approvisionnement syrien reste secondaire et l'Inde, qui devrait importer plus de 400 000 tonnes en 2024. Mais le pays s'en remettra : il se fournit majoritairement ailleurs pour répondre à ses besoins en phosphate évalués à 8 millions de tonnes.
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La Russie, premier fournisseur mondial de blé, multiplie les mesures pour cadrer ses exportations. Pour l'instant le marché mondial s'en accommode, car il y a du blé ailleurs et peu de demande.
+32% de droit d'exportation sur le blé, c'est la dernière mesure annoncée par le gouvernement russe qui cherche à augmenter ses recettes. « Cette mesure devrait avoir un impact local plus qu'international », explique Damien Vercambre, analyste chez Inter-courtage. S'ils veulent rester aussi compétitifs qu'aujourd'hui, les exportateurs russes en effet feront en sorte de ne pas répercuter cette taxe qu'ils doivent payer, mais tenteront d'acheter moins cher sur le marché local.
Le mois dernier, les autorités ont revu le quota d'exportation de blé qui serait appliqué de mi-février à fin juin 2025. « C'est la conséquence de stocks de début de saison presque inexistants et d'une production en légère baisse par rapport à l'année dernière, plus basse que la moyenne de ces cinq dernières années », explique l'expert.
37% des cultures d'hiver seraient en mauvais état ou n'auraient pas germé en raison d'un faible niveau d'humidité dans le sol, selon l'Agence nationale de météorologie.
Cette mesure signerait donc surtout une capacité d'export limitée, plus qu'une volonté de restreindre par principe le commerce, explique un de nos interlocuteurs. Au contraire, ajoute-t-il, la Russie « cherche à vendre partout » et elle ne manque pas une occasion de faire la promotion de son blé, comme l'illustre un accord signé fin novembre au Maroc pour l'achat d'un million de tonnes de blé russe cette année.
Mais de fait, en raison de la baisse de la production russe, le pays devrait peser un peu moins dans les échanges cette année : selon les estimations, les exportations de blé russe pourraient diminuer de cinq millions, voire même de dix millions de tonnes.
Cela n'inquiète pas pour autant les marchés qui n'avaient pas non plus été perturbés par les mauvaises nouvelles venant de France premier exportateur européen de blé.
Le manque de blé, en Europe et en mer Noire, devrait être plus ou moins compensé par les récoltes à venir de l'hémisphère sud : les perspectives de production australiennes et argentines sont meilleures que prévues. Le blé argentin a été l'origine la plus compétitive ces dernières semaines, assure un analyste, et cela n'a pas échappé aux pays d'Afrique subsaharienne qui délaissent le blé de la mer noire et le blé européen, selon les observations d'Argus Media France.
L'autre facteur qui rassure les marchés, c'est la demande atone. La Chine achète très peu en ce moment, si ce n'est du soja et du sorgho. Même les prix actuels qui devraient être attractifs ne suffisent pas à relancer les commandes chinoises de blé.
L'équilibre du marché dépendra dans les prochains mois de la demande asiatique qui est appelée à devenir de plus en plus le moteur de la demande globale : la consommation par habitant est en baisse chez les principaux importateurs africains alors qu'elle augmente chez les plus grands acheteurs asiatiques selon Argus Media France qui cite notamment les besoins croissants de l'Indonésie, où le secteur meunier est en plein essor.
En l'espace de deux mois et demi, le cours de l'huile de palme a grimpé de plus de 35% sur les marchés asiatiques. Cette évolution est en partie liée à des intempéries survenues ces derniers jours en Malaisie, deuxième producteur mondial. Cependant les prix pourraient rester élevés à l'avenir, tirés par l'augmentation de la population mondiale, en particulier urbaine.
Des pluies diluviennes se sont abattues sur l'Asie du Sud-Est ces derniers jours et ont provoqué des inondations dans plusieurs pays de la région. Parmi eux, la Malaisie, deuxième producteur d'huile de palme derrière l'Indonésie. Ensemble, ces deux pays représentent près de 80% de la production mondiale. Les intempéries rendent temporairement plus difficile l'accès aux palmeraies et donc la récolte des fruits. Cela a ralenti à court-terme la production (-10% entre octobre et novembre en Malaisie), alors que le secteur manque déjà de main d'œuvre dans le pays. Bien que l'Indonésie ait été moins touchée, ces facteurs ont ainsi contribué à « l'inquiétude des marchés » et à une hausse des cours, analyse Jean-Marc Roda, directeur régional en Asie du Sud-Est insulaire du Cirad, le Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement.
Autre élément d'explication, « les stocks sont plus bas en Malaisie qu'à la même période l'an dernier », remarque Nicolas Turnbull, agronome et entrepreneur du secteur.
Enfin, les perspectives d'utilisation d'huile pour remplacer le kérosène des avions participent à tirer les prix vers le haut, ajoute-t-il. L'an dernier, l'Union européenne a en effet décidé d'imposer progressivement aux compagnies aériennes un seuil minimum de carburants dits durables, notamment des huiles usagées : 2% dès 2025, 6% en 2030, puis 70% en 2050.
Au-delà des fluctuations des marchés ces derniers mois, les cours de l'huile de palme devraient rester élevés à long-terme, c'est-à-dire dans les prochaines décennies. Car la hausse de la population mondiale, en particulier en ville, « va augmenter la demande en huiles végétales », souligne Jean-Marc Roda.
Or les marges de progression en termes de production sont plutôt à trouver du côté de l'huile de palme, en améliorant la productivité des parcelles, estime-t-il.
Les espaces agricoles disponibles pour cultiver plus d'oléagineux manquent dans les pays tempérés. Certains grands groupes industriels regardent donc déjà s'ils peuvent « sécuriser des terrains dans des zones tropicales en Afrique pour les convertir » en cultures de palmiers à huile, ajoute le chercheur.
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