Fréquence Terre propose chaque semaine des chroniques diverses et variées sur les thématiques de l'écologie, du développement durable, de la nature et de l'environnement. Retrouvez nous sur notre site www.frequenceterre.com
Elles en ont de la chance les éditions des Presses de la Cité d’avoir une pléthore d’auteurs qui les alimentent en récits dits de terroir dans leur mythique collection à succès « Terres de France » !
Coup sur coup, quatre titres m’ont été proposés, celui de Didier Cornaille, Les Arrosoirs de Casamance a directement attiré mon attention par cette histoire de combat pour la sauvegarde de la Nature qui, je vous l’avoue, m’agrée davantage que des récits des deux dernières guerres mondiales qui commencent à devenir récurrentes.
C’est classique. Ce que promoteur immobilier acoquiné aux politiciens veut, généralement le citoyen n’en veut pas. Car, arcbouté à, je cite, l’accroissement exponentiel de ses profits, comme le souligne l’auteur, ledit promoteur n’a aucune empathie ni le moindre remords à imposer son projet titanesque qui défigure un immense pan de la nature bourguignonne, sans compter avec un déséquilibre irréversible dans la vie quotidienne de La Louverie, paisible et charmant village où forêt, rivières et colline suffisent à perpétuer une vie rurale devenue tellement précieuse.
Et, déboussolés, ce furent les habitants qui réagirent, à l’instar de Benoit, la quarantaine, qui a choisi de gérer la ferme familiale au lieu de partir à la ville comme fonctionnaire ou commerçant.
Durant ce temps, la machine immobilière, de mèche avec un retraité d’affaires nichant au château, a dans ses cartons une zone commerciale et un tentaculaire lotissement.
Imaginez une belle et grande plaine verdoyante transformée en temple de la consommation avec, je cite encore l’auteur : « La grande distribution, celle qui se soucie peu des petits commerces, avec ses énormes enseignes lumineuses, ses parkings toujours grouillants d’activités… », il y a de quoi être inquiet et réagir pour sauvegarder ce qui peut encore l’être.
Mais, que manigance-t-on exactement au château blotti, là-haut, dans la forêt, qui semble défier ces bouseux de villageois ?
Que vient faire la belle Irma qui cohabite avec Rodolphe, enfant du pays magouilleur ? Quel est le projet de cet ancien bûcheron devenu patron d’une exploitation forestière ?
La Louverie ne veut pas mourir, la lutte est déclarée, la jolie Irma et l’agriculteur Benoit semblent tisser une belle relation intime, alors que Rodolphe prêche le faux pour savoir le vrai dans cette affaire immobilière avec certains qui préfèrent les petites fleurs, le chant des oiseaux et les sous-bois…
Que cache réellement cette histoire ?
Et, celle de Frédérick D’Onaglia, auteur des Princes de la vallée ?
Dans cet autre récit, on voyage dans les Alpilles et le Parc des Cygalines, synonyme d’indiscutable richesse patrimoniale provençale.
Ici, aussi, il est question de travaux et de mainmise sur cet endroit exceptionnel.
Cependant, si la directrice du parc, Claire, désire ardemment sauver une chapelle et une stèle menacés par un projet d’agrandissement, elle a à vivre un présent douloureux sur le plan physique et moral qui, subtilement, réveille en elle un troublant passé.
La lutte de Claire face à la détermination de Victoire de Montauban dans la gestion du parc, soulève des passions, des moments de suspicions, des accrochages dans Fontvieille, le village où se déroule cette histoire.
Avec Un été à Cameline, d’Aurélie Hardelé, on ne quitte pas les champs de lavande, là-bas, entre mont Ventoux, le Chauve, et le Luberon.
Naïs, 29 ans, est d’ailleurs rentrée dans son village natal après plus d’une décennie de vie parisienne, mais le cœur est lourd avec le décès de sa mère, un mariage malheureux, une carrière professionnelle tirée comme un boulet.
Mais, elle vient d’hériter une propriété agricole avec de la lavande à perte de vue et, parmi les champs et les savons, il y a un gîte.
Dans ce chaud décor, Naïs va être aux prises avec un fameux dilemme : Gabriel, ami d’enfance, et elle, c’est trop de souvenirs, alors qu’Arthur, vacancier, ne la laisse pas indifférente.
Enfin, voici Gilbert Bordes et Ceux d’en haut. Cet auteur majeur aux Presses de la Cité, membre de la Nouvelle École de Brive, fait voyager ses personnages dans le limousin, région d’où a disparu le père de Fanny, Laurent.
Peintre assez connu, il était tombé dans l’alcoolisme et les produits stupéfiants, ce qui lui avait fait perdre sa notoriété.
Mais, ô miracle de la nature, ce fut dans un village perché sur le plateau de Millevaches qu’il avait retrouvé goût à la vie et à la peinture.
Hélas, pour les villageois il restait un étranger et, bien entendu, vous l’aurez compris, sa fille fouilla dans le hameau et dans les histoires de ses rares habitants.
Une révélation quasiment au quotidien qui la mena à cibler un secret paternel tout en se reconstruisant elle-même par suite de sa récente rupture amoureuse.
Patrick Buisson, politologue, ancien conseiller de Nicolas Sarkozy et collaborateur de l’ancien média de droite extrême Minute, après son essai Fin d’un monde paru en 2021, dans lequel il clamait à tire-larigot que tout était mieux avant Mai 68, ce pamphlétiste conservateur vient de sortir Décadanse – d.a.n.s.e – chez Albin Michel.
Soit un ouvrage qui évoque principalement la révolution sexuelle des années soixante-dix et la nouvelle religion, selon lui, l’hédonisme avec son lot de culte de l’ego, de comportements à la Gainsbourg, celui qui inventa le terme « décadanse » où, écrit-il, Ménie Grégoire qui sévissait sur les ondes de Radio Luxembourg s’obstinait à vouloir faire des ménagères des machines à produire des orgasmes en rafales.
Cinq cents pages, c’est long, très long, surtout qu’il y en a une bonne quinzaine en petits caractères serrés rien que pour évoquer les sources de cet essai.
Amour dit libre, contraception, IVG, consommation et spectacularisation du corps, la belle et érotique Emmanuelle, Françoise Sagan, Brigitte Bardot, Jeanne Moreau et les autres, masturbation, couplisme, l’amour au féminin, la féminisation, l’abolition du patriarcat, tout, vraiment tout, est passé à la moulinette par Patrick Buisson.
C’est bien écrit, il faut être objectif, c’est super documenté, reconnaissons-le.
Parfois, cela fait s’esclaffer. Un rire parce que ça fait marrer ou, alors, un rire en forme de sarcasme.
Ainsi, quand l’auteur, en parlant de celle qui fit fantasmer des hordes d’hommes, c’est-à-dire Brigitte Bardot, il la présente comme une figure féminine de désordre qui va contribuer à infléchir les comportements amoureux et comme un produit raffiné de la haute bourgeoisie catholique, donc, une BB à l’érotisme insolite et insolant, ce n’est que l’apéro avant le plat principal.
Celui du bon vieux ultra conservatisme que nous avons pourtant tenté de balayer en Mai 68. En vain, à lire Patrick Buisson.
Sous le titre « Éloge à la masturbation », voici sa prose : « Outre le débat sur l’orgasme, la question de la légitimation de la masturbation focalise l’attention de tous ceux qui, à un titre ou l’autre, prétendaient au monopole de la manipulation symbolique des conduites privées. La répression de l’autoérotisme comme celle de la jouissance féminine appartenaient à cet ancien monde qui avait pour fondements la maîtrise de soi, la retenue et la dignité. »
Et, une dernière citation pour le dessert et le pousse-café, voulez-vous ? Accrochez-vous.
« La grande force du catholicisme avait été d’installer l’amour humain comme la figure par excellence de l’amour divin, le projet de Dieu sur les hommes qui se donnait à voir en lui et d’ajouter ainsi à l’expérience affective des couples ce supplément d’âme auquel le lien qui unissait les époux devait sa transcendance et sa sacralité. »
Eh bien, sincèrement, je suis content d’avoir vécu jusqu’à présent, c’est-à-dire 77 ans, pour lire ça.
Et, quand l’épilogue de cette brique a pour titre « Chant funèbre pour une génération maudite », je me dis que j’ai bien eu du mérite à vous parler de ce livre.
Selon Clare Doyle, membre du secrétariat international du Comité pour une Internationale Ouvrière : « En France, comme dans beaucoup d’autres pays, il pourrait y avoir aussi une irruption soudaine de luttes de classes sérieuses. La désindustrialisation a détruit un demi-million d’emplois depuis 2001 dans la « ceinture de rouille » du Nord-Est de la France. Entre 2001 et 2006, il y eut une augmentation massive de la proportion du salaire d’un ouvrier utilisée pour payer ses besoins alimentaires de base et ses factures : de 50 à 75% », écrivait-elle en 2008, soit quatre décennies après les événements de Mai 68
Ces événements, écrit-elle encore, ont aussi démontré de façon concluante que la révolution socialiste ne peut être mise en œuvre par une autre classe que la classe ouvrière elle-même.
En France, en 1968, avec la puissance importante de la classe ouvrière et le soutien des classes moyennes, la révolution socialiste aurait pu être menée à bien pacifiquement en quelques jours, conclut-elle.
Et en 2023 ? Geoffroy de Lagasnerie, auteur de Sortir de notre impuissance politique paru chez Fayard, indique : « Dès que nous nous plaçons en position défensive, les forces réactionnaires progressent car nous sommes condamnés, dans le moment même où nous luttons, à présenter comme norme positive l’ordre institué des choses. Les pensées réactionnaires, petit à petit, gagnent du terrain. Quand on critique une mesure en la qualifiant d’exceptionnelle, de régressive, on a tendance à vouloir retrouver, et donc conserver, l’ordre qui était là avant, alors que c’est précisément lui qu’il faut attaquer. »
En somme, tout le travail de sape social-démocrate et de droite commencé par Mitterrand et poursuivi par les Sarkozy, Hollande et Macron a creusé un sillon au grand profit de Le Pen.
Le dernier essai d’Edgar Morin s’intitule « Réveillons-nous ! » et vient de paraître chez Folio.
Que peut encore servir l’écrivain centenaire pour secouer les consciences ? N’a-t-il déjà pas tout exprimé dans ses multiples ouvrages et apparitions publiques ?
Que du contraire, le voici qui s’attaque de manière tranchée au transhumanisme, ce qui conduit, selon lui, « à une métamorphose où l’humain deviendrait à la fois métahumain, surhumain et post-humain ».
Inutile de vous dire qu’il n’apprécie guère ce changement : « Peut-on laisser à des entreprises scientifiques vouées au profit le droit de créer par manipulations génétiques des spécimens posthumes dangereux ? »
Et d’y répondre :
« Un mythe transhumaniste est celui d’une société harmonieuse régulée par l’intelligence artificielle (IA) qui expulserait tout désordre. Or l’expulsion du désordre exclut toute initiative, toute créativité. L’ordre impeccable est l’ordre implacable. Le gagner ne vient pas des robots, mais du risque que les humains deviennent des robots. »
Un autre argument pour Edgar Morin :
« Toute la philosophie transhumanisme masque le vrai problème de l’humanité, qui n’est pas l’augmentation quantitative de ses pouvoirs mais dans l’amélioration qualitative des conditions de vie et des relations humaines. L’enjeu essentiel n’est pas de changer la nature humaine, mais d’en inhiber le pire et d’en favoriser le meilleur. »
Et, aussi, de constater les dégâts du néo-libéralisme mondialisé qui, selon lui, « n’est autre que la toute-puissance mondiale du profit, celle qui provoque des catastrophes écologiques et l’asservissement des populations, suscitant de multiples révoltes, toujours réprimées. »
Il ajoute que « la trinité science-technique-économie est de plus en plus animée par la domination insatiable du profit ainsi que par l’énergie implacable des États et que la puissance sans conscience fait de nous des impuissants : puissance sans conscience n’est que ruine de l’âme », clame-t-il avec détermination.
Pour lui, « les interdépendances de la mondialisation techno-économique n’ont apporté aucune solidarité lors de la crise sanitaire mondiale due à la pandémie du Covid-19 ».
Il constate également un fléau rampant sur toute la planète, je le cite encore : « Toute vie individuelle peut aujourd’hui être surveillée par drone et satellite, contrôlée par reconnaissance faciale, toute vie privée peut être violée à partir des écoutes de téléphones portables et du piratage de nos données personnelles. »
Alors ? Comment remédier à cette chute des valeurs et de la vie sur Terre ?
Pour Edgar Morin, cette gigantesque crise écologique ne pourra être résolue que par une politique assurant la décroissance de tout ce qui pollue et détruit, et la croissance de tout ce qui sauvegarde et régénère.
Une nouvelle politique, en somme, qui concerne tous les aspects sociaux, techniques, scientifiques, une politique de l’énergie qui se substituerait aux énergies polluantes, une politique de l’eau, de la ville, des campagnes, de l’Éducation, de civilisation, en d’autres termes, une politique pleinement humaniste, même si, d’après son analyse « les innombrables associations et mouvements de solidarité se heurtent toujours aux égoïsmes et aux compartimentations sociales. »
Bref, à nous de faire changer cela. Donc, de se réveiller face à une réalité incontournable. Le temps des chimères consuméristes est révolu.
Place à la solidarité et à l’humanisme concrets, pas des prêchi-prêcha de salons feutrés.
Nonobstant un nombre impressionnant de « con » et de « connerie » qui parsème l’ouvrage Le dernier qui restera se tapera toutes les veuves paru aux Nouvelles éditions Wombat, François Cavanna, son auteur, se voit, ici, rassemblé en de nombreuses nécrologies qu’il écrivit, souvent au picrate, parfois avec tendresse, dans Charlie Hebdo de ce que je considère comme la belle époque du magazine, c’est-à-dire celle des Reiser, Wolinski, Cabu, Choron et cie.
J’avoue avoir pris beaucoup de plaisir quand il descendit en flammes Jean-Paul Sartre, alors que l’intelligentsia occulte le passé de collaborateur de ce personnage, tout comme celui de Simone de Beauvoir, d’ailleurs.
Je vous livre quelques passages de ce livre en commençant, bien sûr, par ces mots à l’égard de Sartre : « Sartre veut se mettre à la portée du peuple. De ce qu’il suppose être le peuple. Alors, en avant, de la grosse haine bien con bien haineuse, à la louche. Au faciès. On croirait lire Minute (le magazine d’extrême droite de 1962 à 2020) parlant d’un immigré. »
J’ai quelque peu côtoyé François Cavanna (1923-2014) lors d’une semaine de marche entre pacifistes, alors qu’il était encore le patron de Charlie Hebdo.
Après avoir appris la mort d’un orang-outan de huit ans, Dayou, au Jardin des Plantes à Paris, il écrivit ceci : « À bas les zoos ! Aussi modernes, aussi perfectionnés soient-ils, ce sont des prisons, des bagnes, des lieux d’infinie tristesse.
À bas les ménageries, à bas les cirques, surtout les itinérants !
À bas le dressage, à bas le domptage, à bas les spectacles d’animaux ‘‘savants’’ !
Laissez les bêtes sauvages là où elles sont, c’est-à-dire chez elles !
À bas le foie gras !
C’est ça, ricanez. Rotez un bon coup et emmenez votre gosse voir les singes qui sont si laids avant d’aller éparpiller un peu de plomb sur des faisans d’élevage.
Mais ne lisez pas ce journal, sale con de chasseur ! »
Concernant Michael Jackson, que ses fans s’accrochent : « Il faut regarder les choses en face, Michael Jackson était raciste. Raciste contre sa propre race, en plus. Ce qui est pire que tout. Une sale pourriture de raciste, donc.
Il n’aimait pas les nègres, or il en était un. Il gagnait des sommes fabuleuses. Il employait tout ce pognon à effacer les témoignages extérieurs de sa négritude, mais ça ne trompait personne. »
Concernant des politiciens décédés, il n’y allait pas de main morte, si j’ose m’exprimer ainsi :
« L’homme politique, ou bien vit dans une honnêteté, une chasteté, une rigueur morale inexpugnables, ou bien se débrouille pour en avoir l’air. Sans une faille. C’est-à-dire est un beau spécimen d’hypocrite. »
« En politique tout est possible. Même des trucs tellement tordus, tellement invraisemblables que tu n’oserais pas les mettre dans un roman, le lecteur ne marcherait pas. »
« Les grands politiciens (ou qui s’autoproclament grands), s’entourent de médiocres pour être sûrs d’émerger. Ils ont l’art de s’entourer de nullités. »
Voici une soixantaine de pages d’un livre petit format qui dérange les caciques, les puissants et autres décideurs, parfois autoproclamés. Un ouvrage écrit avec les tripes, avec l’expérience d’un engagement de terrain et pas de salon, à savoir Une terre commune de Cédric Herrou paru chez Seuil.
Cédric Herrou, c’est celui qui, depuis des années, doit avoir la conscience en paix, alors que certains apparatchiks du pouvoir peuvent se poser de légitimes questions à ce sujet.
Ce n’est pas le préfet Georges-François Leclerc, alors en charge des Alpes-Maritimes, qui contredira l’activiste Herrou qui, d’ailleurs, lui dédicaça son essai d’un « amer souvenir ».
Le député Éric Ciotti, quant à lui, étant du même avis que le préfet pour interdire l’accès au territoire de gens en perdition.
Cédric Herrou, est un paysan qui habite la Roya, « terre de douleur et de douceur » dans une vallée entre la France et l’Italie, là où passent de très nombreux réfugiés, souvent en transit pour les îles britanniques.
Alors, dès 2016, il décida d’héberger, de secourir, de tendre la main, à ces personnes alors que la politique étatique était de les empêcher d’entrer sur le territoire, en somme, de les rejeter à la Méditerranée.
Sans conteste, le droit fut allègrement piétiné par les autorités et, quand bien même il n’en aurait pas été ainsi, l’aide à autrui en danger ne supplante-t-il pas toutes les lois et les décrets que peuvent concocter certains politiciens ?
Cédric Herrou n’écouta que sa conscience et avec des amis, il accueillit, et accueille encore d’ailleurs, autant que possible ces rejetés et cabossés de notre Société. Ceux qui fuient l’horreur de la guerre ou la terreur de régimes dictatoriaux.
Son action humaniste récurrente fut considérée comme un délit de solidarité. Alors, il posa une question majeure : « Sommes-nous encore libres d’être fraternels ? »
Il y répondit lui-même : « Quoi qu’il advienne, je continuerai ».
Une autre réponse ne tarda pas et les caciques, les décideurs, les autoproclamés décideurs, le firent arrêter, placer en garde à vue pour avoir aidé des Soudanais, des Érythréens, parmi eux des mères et leurs jeunes enfants…
Condamné à des amendes, à de l’emprisonnement avec sursis…, comme certaines personnes qui le secondaient dans son humanisme, il fut relaxé par la Cour de Cassation au bout d’une impressionnante bataille politico-judiciaire.
Aujourd’hui, Cédric Herrou poursuit son travail sur le terrain de la solidarité universelle.
À la lecture de son ouvrage, à l’écoute de ses propos, avec ma propre expérience de l’engagement citoyen, je peux dire que, face à l’iniquité, à l’injustice, au mépris de la personne humaine, nous avons tous le devoir de dénoncer l’inacceptable car notre silence nous rendrait complices.
Faire corps pour se faire entendre des puissants qui méprisent les individus de la sorte est une nécessité morale.
Il n’est pas question de neutralité et il ne faut pas hésiter à interpeller les pouvoirs publics.
Hélas, force est de constater que certaines associations ayant pignon sur rue, ne le font guère ou, alors, du bout des lèvres, par peur de perdre des subventions.
Que ces associations n’oublient pas deux choses : ces subventions n’émanent pas directement de la poche des décideurs et des puissants, mais de l’ensemble des citoyens par leurs taxes et impôts et, aussi, que « chaque jour passé dans le silence est un jour de perdu pour notre conscience ».
Dans Leur folie, nos vies, paru aux éditions Les Liens qui Libèrent, François Ruffin porte un regard acéré et choqué sur la gestion de la pandémie au coronavirus par les gouvernements et les multinationales qui, bien souvent se liguent entre eux pour davantage creuser le trou entre ceux de tout en haut et les citoyens lambdas.
Un constat : dans cette crise engendrée par le virus, les scientifiques ont été largement écoutés et suivis dans leurs préconisations.
On passa quasiment automatiquement du diagnostic scientifique à la prise de mesure, explique l’auteur.
En revanche, les scientifiques qui évoquent le climat, tel le GIEC, sont écoutés poliment, puis rien ne bouge.
En cause : l’économie, celle des nantis, des actionnaires, des Macron et Cie qui, au minimum, doit être absolument sauvegardée, si pas davantage rentabilisée à leur seul profit.
Bientôt, on atteindra une moyenne supplémentaire de deux degrés, ce qui signifie qu’on pourrait mourir en sept ou huit minutes sous la pression conjointe de la chaleur et de l’humidité.
Déjà, des régions entières de la planète deviennent inhabitables.
Réaction des nantis, des actionnaires et des Macron et Cie, on n’interrompt pas les affaires, l’économie avant la vie !
« Tous les pans de la vie sont ainsi traités, maltraités, passés aux oubliettes, à la moulinette d’une calculette. »
Une conclusion : le combat contre les forces obscures ne se renonce certainement pas.
Photo : Pixabay.
Enfin, la voiture stoppe devant une vaste maison grise à l’aspect sévère, édifiée sur une pente abrupte. Les volets bleus sont ouverts. Roger nous prie de rester assis tandis qu’il va frapper à la porte. Quelqu’un lui ouvre et il nous fait signe de le rejoindre avec nos bagages. Pendant que nous nous activons sous un vent glacial, Roger dissimule le véhicule sous les arbres. Il semble n’y avoir personne à des dizaines de kilomètres à la ronde, toutefois mieux vaut respecter les règles de sécurité.
À l’intérieur, il fait chaud, à condition de s’installer à proximité de la cheminée. Les pierres des murs sont apparentes. J’ai le temps d’apercevoir plusieurs pièces sobrement meublées, un four à pain dans la cuisine sur la gauche, avant d’entrer dans une grande salle à manger. Je ne connais pas l’homme qui nous précède. Très brun, il paraît espagnol. Il ne dit pas un mot. On pose nos valises sur le sol, attendant on ne sait quoi, et on en est tous soulagés de voir réapparaître Roger.
« Je vous présente Alberto. Il est espagnol et ne s’exprime que dans sa langue, que je parle aussi. C’est pourquoi il doit se cacher : le moindre mot le trahirait. »
Des pas résonnent au premier. On se regarde, sur le qui-vive… »
Avouez que vous avez envie de connaître la suite, non ?
Cet extrait est tiré du roman Les Souvenirs et les Mensonges aussi… de Karine Lebert paru aux Presses de la Cité. Un roman qui est non seulement raconté comme une enquête en quelque 600 pages, mais aussi un imposant pan de l’histoire qui plonge le lecteur dans la montée du nazisme, dans la clandestinité d’un réfugié allemand à Honfleur, dans l’Après-guerre et l’occupation par les Alliés de Berlin.
Ensuite, quelque soixante-dix ans plus tard, c’est la rencontre entre deux jeunes musiciennes, une Française et une Allemande, moment qui déclenche une intrigue digne d’un excellent polar se terminant par une déclaration en forme de résolution de l’énigme : « Nous étions très émus tous les deux par ce pèlerinage à Honfleur… »
À dix kilomètres du Vésuve et un demi kilomètre de la mer, Pompéi fut une cité avec ses rues bordées de maisons, ses thermes, plus de soixante tavernes, son amphithéâtre, le forum, la Maison des Pygmées, la Maison-bar d’Amarantus, le Temple de Venus, celui d’Isis, une boulangerie, des bâtiments municipaux et son célèbre lupanar, tel est le décor d’un chapitre de l’essai Les Cités disparues d’Annalee Newitz paru chez Calmann-Lévy.
Un constat particulièrement intéressant à la lecture de cet ouvrage : « En un sens, l’archéologie des données représente la démocratisation de l’histoire. Elle se penche sur les activités des masses et s’efforce de reconstituer leur vie sociale, voire psychologique. »
Ainsi, dans les années 1700, des fouilles furent entreprises et sous la cendre durcie ce fut une incroyable révélation. Tout avait été préservé de cette vie quotidienne au temps de l’apogée de l’Empire romain.
On retrouva même sur la façade d’une propriété appartenant à une certaine Julia Felix, une inscription peinte : « À louer dans le domaine de Julia Felix, fille de Spurius : élégante suite de bains pour clientèle de prestige, tavernes, mezzanines et appartements à l’étage pour un bail de cinq ans. »
Quant à la Maison des Colonnes en mosaïque, elle ressemblait à un centre commercial avec de multiples boutiques.
La particularité des fouilles contemporaines réside en cette phrase prononcée par un chercheur : « Pour moi, l’important n’est pas les César ni autres empereurs sur qui nous en savons déjà trop, mais les gens dont nous ne savons rien. Même si nous ne connaîtrons jamais leurs noms, nous pouvons essayer de reconstituer un peu leur vie. »
C’est, bien sûr, le fil rouge de ce chapitre qui nous plonge au fil des découvertes dans un quotidien où, déjà, il y avait la lutte des classes.
Ainsi, un individu né esclave à Pompéi pouvait gravir les échelons et parvenir presque au sommet de la hiérarchie sociale, alors qu’un conflit éclata entre nantis et démunis pour l’accès aux plages.
Et, précise l’auteur : « Pompéi trépassa au beau milieu d’un litige qui opposait riches et pauvres, hommes et femmes, immigrants, Romains et autochtones. »
Assurément, il n’y a rien de nouveau en ce XXIe siècle !
J’ai particulièrement apprécié Les cités disparues, un ouvrage d’Annalee Newitz paru chez Calmann-Levy, avec en sous-titre « Voyage insolite aux origines de nos civilisations ».
Ici, il n’est pas question d’une immersion parmi les rares peuples racines qui survivent sur la planète, tel celui d’Amazonie dont le président Lula a promis de s’occuper de manière enfin positive, mais d’une autre approche qui consiste à plonger le lecteur dans une passionnante découverte de quatre brillantes cités d’autrefois.
À savoir, Çatal Höyük en Turquie considérée comme l’une des premières villes de l’histoire de l’humanité, ensuite Pompéi, puis Angkor et Cahokia aux États-Unis.
Avec Annalee Newitz, on sort de l’imaginaire, de récits d’aventures en vogue à une certaine époque.
La mise au point est explicite en ce sens : « Le mythe des cités perdues occulte la réalité des voies empruntées par les populations pour détruire leur civilisation. »
La cité d’Angkor n’a-t-elle pas disparu à cause d’une crise climatique ?
Cet essai propose une réalité non romancée de « quatre exemples de désertion urbaine, spectaculaires entre tous, de l’histoire humaine. »
Cette réflexion met en relief des problématiques actuelles et, du coup, éclaire la situation de différentes villes tout en évoquant l’avenir.
Comme le souligne cet ouvrage : « Nous fonçons vers un futur dans lequel les métropoles seront devenues invivables, mais où les solutions de remplacement se révéleront pires encore. »
Les quatre cités, Çatal Höyük, Pompéi, Angkor et Cahokia accueillirent pourtant des civilisations brillantes « dont le sombre avenir n’était nullement fixé par le destin. »
Quatre cités qui feront, chacune, l’objet d’une chronique spécifique, car, après tout, c’est de leurs erreurs que nous pouvons éventuellement tirer les meilleurs enseignements… ceci à l’heure de la COP 27 !
Your feedback is valuable to us. Should you encounter any bugs, glitches, lack of functionality or other problems, please email us on [email protected] or join Moon.FM Telegram Group where you can talk directly to the dev team who are happy to answer any queries.